Vins & spirits

Etonnants beaujolais très nouveaux : Château de l’Hestrange, de la Maison Jambon, Cédric Vincent et Frédéric Berne

Auteur : Mohamed Najim et Etienne Gingembre
Article publié le 23 novembre 2021

[Les pépites de la révolution viticole] Certains voient la mode du beaujolais nouveau plutôt en déclin, Mohamed Najim & Etienne Gingembre, auteurs de Quand le vin sa révolution préfèrent parler de renaissance tant ce terroir fait preuve d’inventivité pour se relancer. Par chance, la matière grise ne fait pas défaut à ces jeunes aventuriers du Château de l’Hestrange, de la Maison Jambon, Cédric Vincent et  Frédéric Berne pour réussir d’étonnantes merveilles, loin des stéréotypes. 

Depuis le jeudi 18 novembre, le beaujolais nouveau est arrivé.

Domaine des Vins Magnifique côte du Beaujolais ! Maison Jambon à Saint Lager Photo Etienne Ramousse

Il est sur le zinc des bistrots, sur les tables des restos à steak, il est dans les vitrines des cavistes, dans les linéaires des supermarchés, il est dans les bars à vin parisien, dans les bouchons lyonnais et aussi bien sûr dans les restaurants de Tokyo, même si c’est beaucoup moins qu’autrefois…
Ce « beaujolpif » comme l’aurait appelé Michel Audiard est disponible vinifié à la levure 71 B, celle qui lui donne son irrésistible goût de banane. Mais la mode, lancée par Georges Dubœuf en 1951, est un peu passée, plombée par une réputation tenace de « vin industriel ». On en vend toujours, son caractère festif restant son meilleur ambassadeur, mais les volumes ont diminué de 40 % depuis son apogée, dans les années 1980. On a même arraché 3 000 hectares de gamay.
Est-ce à dire que le Beaujolais est en déclin ? Il serait plutôt en pleine renaissance. L’hectare de Beaujolais Villages étant le moins cher de France, les jeunes aventuriers du vignoble, à peine revenus de leur tour du monde, leurs études terminées, se précipitent du côté de Villefranche-sur-Saöne pour faire leurs expériences, et souvent réussir d’étonnantes petites merveilles…

Etrange domaine tout de même que ce Château de l’Hestrange.

Laurent Metge-Toppin dynamique enchanteur du Domaine de l’Hestrange

On est à 5 kilomètres au nord-ouest de Villefranche et si les beaujolais villages tout à fait honnêtes et d’ailleurs multi-médaillés dans les concours de dégustation font la fierté de Laurent Metge-Toppin, ce n’est pas ce qui l’a fait connaître sur l’autre rive du Channel. Cet œnologue a commencé par être courtier en vins à Londres avant de reprendre, en 2000, l’exploitation qui appartint autrefois à sa famille.
Grand admirateur de la reine Elizabeth, il lui écrivit à plusieurs reprises et finit par vendre du beaujolais à Buckingham. C’est ainsi que la reine en vint, lors de son jubilee de 2016, à faire une grave entorse à la tradition. Au lieu d’offrir du champagne Pol Roger aux invités venus célébrer son 90e anniversaire, la souveraine leur fit servir un superbe chardonnay pétillant du Beaujolais fourni par Laurent Metge-Toppin. Et tout le monde s’en trouva fort ravi. Ce crémant de bourgogne blanc de blanc cuvée Elizabeth II est vendu 12,50 euros par le Château de l’Hestrange.

Le Domaine des Vins Maison Jambon au pied du Mont Brouilly

Le Moulin à vent du Domaine des Vins Maison Jambon sous la neige Photo Etienne Ramousse

Si Maison Jambon a décroché le prix du meilleur gamay du monde avec son Chiroubles 2015. Ce n’est évidemment pas cela qui surprend mais son viognier jaune paille aux arômes floraux comme la violette évoluant sur les fruits exotiques.
En bouche, on retrouve la saveur du zeste d’orange, de l’abricot confit, des fleurs blanches et du jasmin. Un blanc idéal pour accompagner un poulet – ce que nous avons récemment fait au Boudoir, un délicieux bistrot gastronomique, 25 rue du Colisée à Paris – voire des rougets ou un fromage goûteux à pâte molle comme le brie ou camembert. 8,80 euros

Le Domaine Cédric Vincent, petite toscane beaujolaise

Cédric Vincent dans les vignes de son domaine

Lorsqu’en 2010, il reprend les vignes familiales, Cédric Vincent se souvient surtout du chardonnay, qu’il plantait tout gosse avec André Guillard, son grand-père maternel, aux Porte des Pierres Dorées, une commune voisine de Villefranche-sur-Saône. Ce souvenir a scellé son destin de vigneron. Dans sa « petite Toscane », il vinifie ce beaujolais blanc qui, outre le brouilly, le saint-amour et le moulin-à-vent, représente aujourd’hui 60 % de sa production. Argileuse en surface, calcaire en profondeur, cette terre lui donne une délicieuse cuvée « L’Ancestrale » qu’il vend 11,50 euros la bouteille.

On n’allait pas vous raconter les nouveaux Beaujolais sans vous parler du gamay.

A Lantigné, un village voisin de Chiroubles, Fleurie, Villié-Morgon ou Régnié-Durette, la nouveauté, c’est un cru qui est en train de naitre. Jusqu’à présent, avec les moulin-à-vent, juliénas, saint-amour, les crus du Beaujolais étaient au nombre de 10.

Frédéric Berne fait naître le onzième cru du Beaujolais, Lantignié Photo DR

Et puis voilà que Frédéric Berne et 25 viticulteurs de sa commune ont décidé de faire de Lantignié le onzième cru de ce vignoble. Ils ont demandé conseil à une pléiade d’experts, de l’agronome Claude Bourguignon aux biodynamistes Pierre et Vincent Masson en passant par l’arboriste Marceau Bourdarias, ils se sont dotés d’un cahier des charges bio extrêmement contraignant pour réussir avec talent à exprimer leurs terroirs de granits roses et de pierres bleues dans leurs lantigniés gourmands et généreux. Vendus entre 9 à 15 euros

Où trouver les Beaujolais nouveaux

Lire : Quand le vin fait sa révolution, Etienne Gingembre et Mohamed Najim, Ed. du Cerf, 2021, 288 p., 20€, et sa « constellation de vins d’exception, de vins de gourmandise, de vins de saveurs, de vins d’émotion »

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