Vins & spirits

Pour les crêpes de la Chandeleur, sortez du blanc pour des aubances, des layons, des jurançons et des muscats

Auteur : Mohamed Najim et Etienne Gingembre
Article publié le 3 février 2022

[Les pépites de la révolution viticole] Comme pour la galette des rois en janvier, les crêpes de la Chandeleur adorent les blancs lumineux saturés de sucres. Mais Mohamed Najim & Etienne Gingembre, auteurs de Quand le vin sa révolution prennent le parti de ne pas saturer le palais de sucre, avec une sélection de aubances, de layons, des jurançons et des muscats nés des Domaines de Terrebrune, Bousquet, des Bernardins, Cazes, Orenga de Gaffory, et du Château Pierre-Bise.

Alors pourquoi les crêpes ?

La crêpe ou la métaphore du soleil

« A tous les coups, c’est encore une fête chrétienne », rigole Mohamed Najim. Eh bien, il n’a pas totalement raison, notre fin connaisseuse des traditions françaises et de leurs divines bouteilles. Cette « fête des chandelles » est d’origine païenne et latine, nous rappellent les encyclopédies et Singulars. Mais comme la chrétienté a pris l’habitude, au fil des siècle, de tout récupérer, les Lupercales romaines, en référence à Lupercus, dieu de la fécondité et des troupeaux, ont fini par céder la place à la Chandeleur, qui célèbre la présentation de Jésus au Temple.

Alors pourquoi les crêpes ? Parce que leur forme ronde et leur couleur dorée rappelleraient le disque solaire, évocation très païenne de l’arrivée prochaine du printemps. Une tradition remontant parait-il au Ve siècle prétend qu’en faisant sauter la crêpe de la main droite en tenant une pièce d’or dans la gauche serait l’assurance de s’attirer la prospérité pendant toute l’année. Nous on veut bien, mais c’est aussi le risque de rater son coup et de flanquer la crêpe par terre, ce qui serait quand même dommage.

Parce que c’est bon les crêpes.

Ce dessert d’origine bretonne ou normande se déguste partout en Europe occidentale et en Amérique du Nord, badigeonné de confiture, arrosé de sirop d’érable, flambé au rhum ou au cognac, ou préparé façon Suzette, à la manière d’Auguste Escoffier, avec de l’orange et du Grand Marnier. Mohamed aime beaucoup mais c’est lorsque l’on évoque les flacons qui peuvent l’accompagner que ses yeux s’allument.

Alors avec quoi ?

Travail au sol d’une parcelle du Domaine de Terrebrune

Eh bien s’agissant de la fête des chandelles, un vin lumineux s’impose. Mais les crêpes étant sucrées et donc souvent couvertes de confitures de fruits – rouges ou jaunes – voire de miel, « un blanc légèrement sucré fera sûrement mieux l’affaire, qu’un vin liquoreux », souligne Mohamed, rappelant un maxime clé de tout œnologue : « Trop de sucre en effet risque de saturer le palais. »
Nous vous avons récemment conseillé des sauternes, des montbazillacs, des quart-de-chaume, des alsaces vendanges tardives et grains nobles. Cette fois, vous vous orienterez plutôt vers les côteaux du Layon ou de l’Aubance, vers les jurançons ou vers les blancs doux naturels, comme les muscats blancs méditerranéens.

L’Aubance et le Layon, deux affluents de la Loire à la saveur et aux tarifs très doux

Pas la peine de se ruiner, quand on est en Anjou, pour déguster un délicieux chenin moelleux, idéal pour accompagner vos crêpes à la confiture de poires du val de Loire.

Le Château Pierre-Bise, à Beaulieu-sur-Layon réussi une cuvée Rochefort en appellation Coteaux du Layon

Au Domaine de Terrebrune, à Notre-Dame-d’Allençon, ce plaisir vous coûtera 8,50 euros la bouteille. Surtout connue pour ses bonnezeaux, liquoreux réputés du côté d’Angers, cette propriété vous proposera aussi un coteau de l’Aubance très miellé, avec « une belle finale sur la mangue et la menthe », comme la décrivent Bettane et Desseauve. Une poignée de kilomètres au sud, le Layon arrose des coteaux parallèles à ceux de l’Aubance.
Le Château Pierre-Bise, à Beaulieu-sur-Layon, vous propose tout une déclinaison de nectars issus du chenin blanc. Joëlle et Claude Papin réussissent particulièrement leur cuvée Rochefort, aux notes d’agrumes et d’abricot, en appellation Coteaux du Layon (16€).

Un jurançon que n’aurait pas désavoué Henri de Navarre

Le Domaine Bousquet propose l’un des meilleurs jurançons

Né à Pau, le futur Henri IV aurait, selon la légende, été baptisé au Jurançon. Plus exactement, Jeanne d’Albret, sa mère, aurait déposé une goutte de ce vin blanc doux sur les lèvres du nouveau-né, qui aurait apprécié. Dans le Béarn, on aime ces blancs sucrés obtenus avec du petit et du gros manseng qui accompagnent souvent les foies gras locaux. Mais ce sont aussi des vins de dessert qui arroseront à merveille une soirée crêpes.
Certains vous diront aussi que le Domaine Bousquet propose l’un des meilleurs

. On y trouve de la truffe, un soupçon d’arôme de coing, de pomme, de miel ou d’épices exotiques pour 15 euros la bouteille.

Les muscats du Rhône méridional et de la Méditerranée

Domaine des Bernardins

Les muscats sont des vins doux naturels, autrement dit des jus de muscat dont la fermentation a été stoppée par l’ajout d’eau de vie de vin de manière à conserver des sucres résiduels et fruités dans le vin. Cette technique, qui a fait la gloire de Porto, est très répandue dans la France méridionale.
A Beaumes-de-Venise, le Domaine des Bernardins est réputé pour la qualité de ses vins rouges comme de ses muscats, aux notes de fruits exotiques et de lavande (15,40 €). S’il se plait sous les Dentelles de Montmirail, sur les contreforts des Alpes, ce cépage se cultive aussi au bord de la Méditerranée. C’est même l’une des spécialités viticoles de Rivesaltes, dans le Roussillon.
A cinq kilomètres au nord de Perpignan, le Domaine Cazes propose un très beau muscat à 13 euros la bouteille. Dans le verre, un premier nez floral évolue vers les agrumes mûrs et les fruits exotiques. Une fois en bouche, sa complexité aromatique s’achève en une finale fraîche mentholée et légèrement épicée.

Le Domaine Orenga de Gaffory protégé par le climat du Golfe de Saint Florent

Si vous prenez la mer vers l’est, vous aurez peut-être la chance, après 200 miles nautiques, d’aborder les côtes du Cap corse. Le Domaine Orenga de Gaffory, grande famille locale, propose une gamme de muscats doux d’excellente qualité (14 à 20 euros la bouteille).

Pour mieux savourer vos crêpes

Lire : Quand le vin fait sa révolution, Etienne Gingembre et Mohamed Najim, Ed. du Cerf, 2021, 288 p., 20€, et sa « constellation de vins d’exception, de vins de gourmandise, de vins de saveurs, de vins d’émotion »

Notre sélection

Partager

Articles similaires

Balade dans les pinots noirs les plus atypiques de l’Hexagone

Voir l'article

Accords vins-mets : ces Domaines viticoles qui se révèlent par un restaurant

Voir l'article

Quand la révolution viticole transcende l’AOC Terrasses du Larzac

Voir l'article

A Collioure, Cahors ou encore à Barsac, le temps est venu de déguster les vins d’automne

Voir l'article