Opéra a Palazzo. ou La Traviata, de Verdi en immersion à la Fondation Dosne-Thiers
La Nouvelle Athènes, écrin pour l’immersion
Paradoxe du COVID, la première initiative de démocratisation de l’opéra en sortie de déconfinement, est l’adaptation réussie du concept vénitien Musica a Palazzo, rodée depuis plus quinze ans. Heureux choix de l’écrin de La Fondation Dosne-Thiers qui l’ accueille et il faut saluer la prise de risques (limités) de l’Institut propriétaire ! Se rendre au cœur de La Nouvelle Athènes, le quartier des musiciens romantiques, où elle se situe participe à la plongée dans le temps. Le cadre – aussi rigide que son ancien propriétaire – n’a rien à envier au Palais Barbarigo Minotto au bord du Grand Canal, il plonge d’emblée les spectateurs dans un jus historique idéal.
Vivre La Traviata au plus prés.
C’est précisément la promesse de cet Opéra a Palazzo, supprimer les barrières entre interprètes et spectateurs et vivre le drame lyrique au plus près des protagonistes. Cette intimité était le jour de la première encore très conditionnée au COVID. Depuis jour après jour, elle ne cesse de s’intensifier, mais il faudra attendre la reprise à la rentrée pour que l’interactivité et la mise en scene de Patrizia di Paolo, rodée à Venise soit totalement libérée. Imaginez que c’est dans les bras des spectateurs que Violetta s’effondre !
Invités dans le salon de Violetta
Pour l’heure, depuis son buonasera qui l’accueille dans son salon, buffet dressé, l’auditeur vit pendant deux heures à moins de quelques mètres l’amour enthousiaste puis sacrificiel de Violetta (interprétée ce jour-là par la soprano Armelle Khourdoïan) au bras du ténor Christophe Poncet de Solages, contrecarré par le baryton Timothée Varon . C’est debout et au Champagne qu’il participe au festif Libiano. L’émotion est palpable à chaque regard, et constitue un véritable défi pour les chanteurs, qui se déplace de salle en salle pour chaque acte, aidés des costumes de l’atelier vénitien de Stefano Nicolao et de quelques accessoires minimaux.
Même avec un instrumentarium de chambre réduit (piano, violon, violoncelle) et un livret condensé sur l’essentiel, la dramaturgie est intacte, radicalement poignante. Ce corps à corps même limité vaut toutes les retransmissions qu’elles soient au cinéma ou à la télévision. D’autant qu’il y a le parti pris de la distribution de faire confiance à de jeunes chanteurs, ce qui rend l’intensité (de la prise de rôle) encore plus palpable.
Une démarche de démocratisation exemplaire
Il faut saluer la détermination sans faille d’ Armand Cohen et Marie-Laure de Bello-Portu fondus d’opéra, et fondateurs de Music Opera Events et du guide Musique et Opéra autour du monde après deux années de report, de permettre à tous, de vivre cette expérience unique dans un écrin historique qu’ils vont contribuer à rendre plus visible. Ce n’est pas le moindre paradoxe de cette année de Commémoration de la Commune où Thiers incarne l’anti-héros.
Par contre, à 350€ la place (certes prestige, incluant le cocktail avec les chanteurs) il faut espérer qu’avec les changements de contraintes liées au COVID à la rentrée, une politique tarifaire permettra un début de démocratisation de l’opéra. Sinon, c’est à désespérer de son avenir.
9 juin, Fondation Dosne-Thiers – 27 place Saint Georges – 75009 Paris
Prochaines dates à 19h30 : 26 juin, 1, 2, 8 et 9 juillet 21 (Réservation opera-palazzo.com) – 350€ catégorie prestige (inclus cocktail avec les chanteurs)
Distribution complète (en alternance) :
- Violetta : Émilie-Rose Bry ; Armelle Khourdoian ; Aurélie Loilier
- Alfredo : Matthieu Justine ; Christophe Poncet de Solages ; Thomas Ricart ; Mathieu Septier
- Giorgio : Timothée Varon ; Jiwon Song ; Benoit Gadel
- Pianistes / chefs de chant : Katia Weimann ; Phil Richardson ; Yuko Osawa
- Violonistes : Anne Balu ; Estelle Diep ; Roxana Rastegar
- Violoncellistes : Cecilia Careno ; Carlotta Persico ; Suzanne Wolff