Jazz : Lisa Simone et Anthony Jambon (Athénée Théâtre Louis Jouvet)
S’ouvrir une carrière de chanteuse de jazz en tant que fille unique de l’immense Nina Simone (1933-2003) n’a pas été une parcours aisé. En se faisant un prénom, Lisa Simone a su trouver sa voix et son identité musicale. Son concert à l’Athénée le 15 novembre accompagné du guitariste Anthony Jambon est l’occasion de venir acclamer toutes les facettes d’un talent qui n’a plus rien à envier à sa prestigieuse génitrice.
Sortir d’un destin griffonné
Lisa Simone naît le 12 septembre 1962, fille unique de Nina Simone et de Andrew Stroud ancien policier devenu son manager. Dès sa plus tendre enfance, elle doit composer avec le caractère ombrageux et les errances psychologiques de sa géniale mère hantée par ses démons : « Ma mère s’est battue pour le monde, mais pas tellement pour moi. »
C’est au cours de sa quinzième année alors qu’elle séjourne chez sa tante que la musique et en particulier le chant lui tendent les bras, sans pour cela imaginer une carrière.
À l’âge de dix-huit ans, lasse de péripéties familiales, elle s’engage dans l’armée et vit comme une somnambule » pendant huit ans. Basée à Francfort au cours d’une soirée dans un club elle accompagne au chant le pianiste et c’est une révélation. Les chiens ne faisant pas des chats, elle se fait remarquer et reçoit de nombreuses sollicitations.
Elle ne le sait pas encore mais sa carrière est lancée. Même si quand elle annonce au téléphone son projet de carrière, après un interminable silence, sa mère n’a qu’un seul mot : « Pourquoi ? »
Lisa a su s’accrocher pour notre plus grand bonheur.
Après plusieurs incursions dans la comédie musicale avec notamment Jésus Christ Superstar et Rent, Lisa devient la chanteuse du groupe Liquid Soul en 1996 qu’elle quitte trois ans plus tard.
1999, année particulièrement importante pour elle. En effet, il s’agit de celle de la naissance de sa fille, de la découverte du cancer de sa mère et à la demande de cette dernière de son duo sur scène avec elle.
Ma musique, c’est du « bon vieux Soul »
Après un retour à la comédie musicale et surtout le décès de Nina, une nouvelle étape de carrière s’ouvre, loin des traces et du destin crayonnées par sa mère. « Tout a changé pour moi quand ma mère est morte, a-t-elle confiée souvent. J’ai dû faire la paix avec elle et, en cessant d’être la fille, je me suis reconstruite seule. » L’autrice-compositeur-interprète s’oriente vers le jazz avec “Simone On Simone”, un album hommage à son icône vénérée de mère. En 2014, libérée de l’ombre tutélaire, elle prend véritablement son envol avec un premier album solo sobrement intitulé “All Is Well”. Désormais admirée pour ses seules qualités de chanteuse remarquable, ses prestations sont particulièrement suivies.
Depuis deux autres albums ont vu le jour, “My World” en 2016 et “In Need Of Love “ en 2019. Chacun d’entre eux apportant une nouvelle pierre à l’édifice d’un prénom maintenant reconnu comme méritant parfaitement le patronyme de Simone.
Assister à ce concert au sein de l’Athénée est l’occasion d’assister à une célébration, celle de la maturité d’une chanteuse détachée du poids de l’hérédité et surtout au sommet de son art, celui de délivrer d’authentiques émotions. L’histoire des Simone n’a pas heureusement fini de s’écrire
@CalistoDobson