Culture

5e Notes du 5,Rue du, de Frédéric Martin sur des livres de photographies

Publié par Frédéric Martin le 16 avril 2025
(Notes du blog 5, Rue du) Chaque mois Frédéric Martin chronique avec empathie « des choses vues ou lues » dans les livres de ses confrères. Les coups de cœur du photographe existentialiste ouvrent de stimulants horizons: L’aval, de Julien Coquentin (Origini Edizioni), L’arbre-machine, un monde en mue, de Sylvie Bonnot (éditions Loco), Télépoétique, de Patricia Morosan & Bianca Oana (sun/sun éditions), Red Bloom, de Alice Pallot (The Eyes Publishing), Immersed in Stone, Black Ice, de Line Bøhmer Løkken (Multipress) et La maison natale, de Lucie Boucher.

L’aval, de Julien Coquentin (Origini Edizioni)

L’aval, de Julien Coquentin (Origini Edizioni)

Dernier opus d’une trilogie – Saisons noires et Oreille Coupée (éditions lamaindonne), L’aval de Julien Coquentin ne déroge pas à cette règle. (…) L’argument se suffirait presque à lui-même pour se porter acquéreur. Mais, comme à l’accoutumée, la proposition photographique est elle aussi de la plus grande qualité. (…)
Le photographe français explore inlassablement des territoires familiers et intimes. Il s’agit ici d’un barrage, des lisières forestières qui l’entourent, d’une rivière. Espace de l’enfance, de l’autrefois, où les jeux se mêlent aux défis, où l’unité de mesure devient le pas. Les prises de vues sont réalisées avec des pellicules Portra périmées, mais aussi pour certaines, des surimpressions, via une antique chambre en bois (…)
L’aval est un livre d’une infinie sensibilité, comme en général l’œuvre de Julien Coquentin. Il ouvre nos mémoires, nous tend la main et nous invite à partir en exploration. Lire plus sur le site 5, Rue du.

L’arbre-machine, un monde en mue, de Sylvie Bonnot (éditions Loco)

Le livre de la photographe Sylvie Bonnot est complexe, protéiforme. Sylvie s’est intéressée, par raisons familiales aux évolutions de la forêt bourguignonne, mais sa recherche l’a poussée à plonger aussi au cœur des forêts guyanaises.

Photographiant celles-ci, creusant les écarts qui se créent, elle choisit une démarche plasticienne pour nous livrer ses observations. Les gélatines des tirages sont décollées des supports, donnant ainsi une nouvelle forme, une mue pareille à ces peaux que peuvent délaisser les serpents quand ils grandissent, symbolisant ces mutations qui parcourent les espaces forestiers. L’ouvrage est accompagné de nombreux textes ainsi que d’un atlas de la forêt bien utile pour comprendre ce qui se joue ici. (…)

Mue, mutation, changement, elle s’aventure ici et là, photographie, contemple, témoigne, traverse les espaces, œuvrant à nous montrer leurs complexités. Le monde change, de plus en plus, et de plus en plus vite. Pourtant les photographies de L’arbre-machine sont aussi un témoignage aussi fort que bouleversant sur ce qui était et ce qui devient. Lire plus sur le site 5, Rue du.

Sylvie Bonnot Corps de brume Fontmartin 2024 L’arbre-machine, un monde en mue (éditions Loco)

Télépoétique, de Patricia Morosan & Bianca Oana (sun/sun éditions)

Télépoétique, de Patricia Morosan & Bianca Oana pages intérieures (sun sun éditions)

L’ouvrage ressemble à un de ces annuaires téléphoniques que nous recevions autrefois, avant l’avènement d’internet. Pages jaunes, fines. Sur la couverture un titre étrange, Télépoétique, en trois langues. Il est publié par sun/sun éditions et les deux auteures sont Patricia Morosan et Bianca Oana.

En l’ouvrant, en faisant défiler les pages, des images fragmentées, des textes traduits en anglais, français et roumains apparaissent. Une sensation de densité, un parcours sans guide, ni repères, mais qui pourtant prend tout son sens au fur et à mesure. À la fin du livre-objet, un texte de Jacques Derrida intitulé Télépathie.

« une image d’une île d’
Une île blanche où les grands vents &
Les nouvelles lunes se rencontr
Une valise »

(…) La photographie et le texte peuvent aller vers des dimensions créatives nouvelles. C’est ainsi qu’il faut lire Télépoétique : comme une tentative qui ne demande qu’à devenir pérenne, mais aussi une ouverture sur ce qui nous entoure et qui infuse en nous. Lire plus sur le site 5, Rue du.

Red Bloom, de Alice Pallot (The Eyes Publishing)

Red Bloom, de Alice Pallot (The Eyes Publishing)

Rouge. Deux mains fantomatiques tendues vers des plantes.
Rouge. Un paysage côtier, le soleil. L’impression d’être sur une planète de SF, Mars dans un film apocalyptique.
Deuxième ouvrage de la collection Civis Maritimus, chez The Eyes Publishing (Véronique Prugnaud et Vincent Marcilhacy), Red Bloom par Alice Pallot, poursuit l’œuvre qu’elle a entreprise autour des algues vertes (on peut se référer au livre Algues Maudites, a Sea of Tears chez Area Books et au travail fait lors de la Résidence 1+2).

Ici, la photographe suit une double piste puisqu’elle a repris ses images en les teintant d’une lumière rouge rappelant l’infrarouge qui permet la prolifération des algues par photosynthèse, et qu’elle a soumis des tirages à l’altération par les cyanobactéries toxiques dans une boîte de Petri. (…) Red Bloom, la voix d’Alice Pallot, sont essentielles dans le paysage photographique actuel : parce qu’il faut dire ce qui se trame, parce qu’il faut alerter les populations. Il y a urgence et la dimension esthétique, la splendeur morbide des images renforcent le poids d’un discours nécessaire et salvateur. Lire plus sur le site 5, Rue du.

Immersed in Stone, Black Ice, de Line Bøhmer Løkken (Multipress)

Cet ouvrage relève plus de l’expérience, de la sensation que de la recherche systématique du dire. Line Bøhmer Løkken s’est rendue sur un glacier du parc national du Jotunheimen qui est en train de disparaître et y a fait des photographies. Fait plutôt que pris parce que les images ici présentées sont bien plus proches de l’expérience physique, de l’immersion dans le lieu que de sa recension. Il n’est pas question de dire la disparition, pas question d’en faire un reportage, juste devenir celui-ci. (…)
L’artiste témoigne à travers les pages de son ouvrage de la chute, matérialisée en autre par ce bref passage par l’eau qu’on imagine glacée. Vertige des rocs sur lesquels on glisse, fonte des glaces, chute lente, inarrêtable, Immersed in Stone – Black Ice nous invite à suivre ce glissement qui paraît sans fin. Lire plus sur le site 5, Rue du.

Immersed in Stone, Black Ice, de Line Bøhmer Løkken (Multipress)

La maison natale, de Lucie Boucher

La maison natale, de Lucie Boucher

« Il (le ruisseau) emporte tout, seuls les souvenirs restent accrochés à ses rives. »

De souvenir, La maison natale livre auto-édité de Lucie Boucher en est plein. Souvenirs d’avant, d’aujourd’hui, de moments fugaces, de rires, de peines, de joies… Souvenirs d’une ou de plusieurs vies qui se sont croisées en ce lieu et qu’a saisi la photographe.
Lucie Boucher nous invite à une promenade lente et mélancolique, déambulation infinie dans un espace qui bien que restreint contient en lui l’immensité du temps. (…) La magie. Voilà le don que nous fait ce livre. Magie du retour et du parcours. Magie des images sans repères flottant dans un lieu atemporel. Lire plus sur le site 5, Rue du.

Pour suivre Frédéric Martin

 

Le site de Frédéric Martin où se trouvent ses différents travaux photographiques

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Sérotonine, film photographique

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