Amazon : Vaste est la nuit / The Vast Of Night de Andrew Patterson (2020)
Uniquement sur Amazon Prime Vidéo depuis le 3 juillet 2020
Connexions synaptiques : dans le magma souvent indigeste des géants du streaming, quelques pépites méritent toute notre attention. Renouant avec la nostalgie et les ressorts bien rodées des films fantastiques des années 50, ce premier film s’impose comme une vraie réussite tant par la réalisation astucieuse qu’une brillante distribution.
Hommage aux séries SF des années 60
En introduction, un hommage appuyé à la mythique série télévisuelle “The Outer Limits” / “Au-delà du réel”, nous plonge dans un salon estampillé fin des années 50. Un arpège de guitare aigrelet accompagne un téléviseur à l’ovalité rondouillarde qui trône sur un buffet. Une voix off à la tonalité mystérieuse se pose sur une mire en noir et blanc représentant une antenne-relais transmettant des ondes, et annonce le programme : “Vous entrez dans un monde entre clandestinité et oubli, un signal entre deux canaux, le musée secret de l’humanité, la bibliothèque privée des ombres, où tout se joue sur une scène bâtie sur le mystère et qui n’existe qu’à une fréquence entre logique et mythe. Vous entrez dans le cinéma Paradoxe. L’épisode de ce soir “Vaste est la nuit” ».
Ce préliminaire fouillé pour rendre autant que possible l’attrayante mise en bulbe de ce petit film à l’envergure bien plus grande qu’elle n’y paraît.
Une nuit initiatique
La petite ville de Cayuga s’apprête à voir se dérouler un match de basket rameutant la quasi totalité de sa population. Everett Sloan, animateur de radio local (magistralement incarné par Jake Horowitz révélation tonitruante qui nous l’espérons aura l’occasion de faire une vraie carrière), en supervise l’enregistrement. La jeune standardiste de la station Fay Crocker (malicieusement interprété par Sierra McCormick), férue de sciences et de technologie, lui demande de l’initier à l’utilisation du magnétophone flambant neuf qu’elle vient d’acquérir…. Cette initiation les amènera à faire face à une série d’évènements qui les dépassent.
Tous les ressorts de la série B
Qualifié par les américains de “teleplay”, en clair un script écrit pour la télévision, ce premier film réalisé par Andrew Patterson et co-écrit avec James Montague et Craig W. Sanger joue et rebondit sur tous les ressorts de la série B des années 50. Un air de nostalgie où le cinéma produisait des films fantastiques sans bénéficier des effets du numérique et parvenait à créer des ambiances fantasmagoriques en maîtrisant les ressorts d’un imaginaire débridé. Comme en leur temps George Lucas et Steven Spielberg qui eux-mêmes revendiquaient ces influences, le jeune Andrew Patterson et ses acolytes empruntent à la même école.
Un petit bijou de cinéma fantastique indépendant
Pris entre un soupçon de “American Graffiti” pour son contexte et “Rencontres du Troisième Type” pour ce que je vous laisse découvrir, ce film enchantera les férus de perles cinématographiques nimbées de mystère. Une lumière crépusculaire et quelques couleurs chatoyantes installent une ambiance particulièrement profonde, sans recours aux effets spéciaux, tirée par une intrigue bien ficelée. Les dialogues captivants parfois énigmatiques ainsi que la relation insolite qui se noue entre les deux protagonistes font de ce “The Vast of Night” une excellente surprise, parfait contrepoint de cette année 2020. La crise sanitaire qui nous frappe semant dans les esprits, doute, angoisse et incrédulité.
Même après plusieurs visions, pris sous le charme occulte du « Cinéma du Paradoxe », vous ne parviendrez toujours pas à en faire le tour et à comprendre ce qui peut bien le rendre si fascinant. À la façon de la fameuse accroche d’Au-delà du réel’ “ce n’est pas une défaillance de votre téléviseur, n’essayez donc pas de régler l’image…”
Pouvons-nous espérer qu’un autre épisode sera réalisé?
#CalistoDobson