[And so rock ?] The Lounge Lizards (1981)

Editions EG 13 titres 39 mn 53 s.

[And so rock ?] Il y a 40 ans, en plein chaudron créatif new yorkais, The Lounge Lizards, un groupe de dandys post modernes proposait un jazz aux racines héritées des années soixante, insufflé d’effluves free épicées de no wave.

Sur une pochette en noir et blanc, défiant certaines excentricités des balbutiantes années 80, sous la houlette du directeur artistique anglais Peter Saville, posent cinq jeunes hommes en chemise blanche, cravate ficelle. Répondant au patronyme intriguant des Lézards de Salon, ce groupe de jazz, car c’en est un, en pleine ébullition créative new yorkaise, repousse l’idée de la mort clinique du genre.
Convaincu de la pérennité de cette musique laissée à cette époque entre les oreilles d’une poignée de connaisseurs, The Lounge Lizards revient aux fondamentaux de l’âge d’or de la modernité absolue du jazz, pour faire court les années soixante,  en y ajoutant l’étincelle de la révolution musicale provoquée par l’explosion punk, la new wave et surtout sa consoeur la no wave.

L’étiquette improbable de Jazz Punk

Du groupe Mars initiateur de cette entreprise de déconstruction à un James Chance et son funk blanc heurté jusqu’à DNA groupe autant influencé par le blues cubiste que par l’atonalité d’un Anton Webern, nos Lézards infusent et régurgitent un jazz de film noir propre à styliser l’atmosphère du New-York de cette époque. Le tout sous l’appellation syncrétique Jazz Punk, interfécondité de l’esprit du rock et de la liberté du jazz.

John Lurie, saxophoniste alto et son frère Evan Lurie aux claviers sont à l’origine du projet. Entourés du guitariste Arto Lindsay dissident du groupe susnommé DNA, du batteur Anton Fier (qui transfugera vers le rock indépendant avec les Feelies) et du bassiste Steve Piccolo, ils déroulent un tapis de 13 titres d’une cérébralité captivante.

Réunissant sous le même toit l’exigence d’un au-delà de la modernité calée sur une tenue maîtrisée, ils parviennent à enrouler autour de leur musique la parfaite expression d’un classicisme transcendé.

  • À commencer par la première composition Incident On South Street et son swing de boogie blafard qui rejette toute idée de renoncement. Le saxophone alto en guise de faisceaux lumineux des phares d’une voiture dans la nuit sur des crissements de guitare en guise de froissement de carrosserie. L’intention est posée, ce jazz esthète donne le ton d’une nouvelle génération. La Knitting Factory n’est plus très loin.

  • Au deuxième titre se révèle la filiation, une reprise enlevée entre suavité et lâcher prise du standard Harlem Nocturne. S’ensuit l’injonction Do The Wrong Thing, qui pointe l’ombre du géant Monk. Plus loin, Au Contraire Arto continue de plus belle entre enroulement mélodique appuyé d’une pointe de free.
  • Arrive l’essentiel Well You Needn’t parfaitement raccord, Thelonious est notre maître à tous.
  • La suite confirme de Ballad tendue à Wangling en pièces de puzzle rythmique éparses jusqu’à Epistrophy, seconde référence Monkienne. La suite s’engouffre dans les remous de cet air du temps si particulier que fut cette période charnière.

Entre contretemps et syncope harmonique, sous la direction de la référence des consoles du jazz contemporain Teo Macero (producteur de Miles Davis, Thelonious Monk bien sûr et de tant d’autres), les Lounge Lizards délivrèrent leur litanie en témoignage de cette perpétuelle innovation graver au coeur de l’adn du jazz.

Par la suite, John Lurie sera aussi acteur (entre autres dans Stranger than Paradise, Down By Law, ou encore Paris, Texas),  et composera un bon nombre de musique de  films, pour finalement ne plus se consacrer qu’à la peinture.

Quant à nos Lézards de Salon ils essaimeront et plusieurs changements de personnel étofferont leur discographie d’une petite dizaine d’albums dont le dernier paraîtra en 1998.

#Calisto Dobson

 

Discographie non exhaustive The Lounge Lizards

  • The Lounge Lizards (EG 1981)
  • Fusion (Europa Records 1984)
  • Queen Of All Ears (Strange & Beautiful Music 1998)

Evan Lurie

  • Happy?Here?Now? (Les Disques Du Crépuscule 1985)

Arto Lindsay

  • DNA  Dna On Dna (No More Records 2004)
  • O Corpo Sutil-The Subtle Body (Güt, For life Records 1996)
  • Mundo Civilizado (Güt, For life Records 1997)

https://youtu.be/uz47h75_FJo

https://youtu.be/VC67EpfhHgQ

Steve Piccolo

  • Domestic Exile (Materiali Sonori 1982)

https://youtu.be/Fpdhl9mHvKk

Anton Fier

  • Dreamspeed/Blindlight 1992-1994 (Tzadik 2003)