BlackBook : le nouveau livre illustré de Bebar (galerie Nanoh)

A l’occasion de la dédicace de son monumental BlackBook via financement participatif à la galerie Nanoh, Singular’s est allé à la rencontre de Bebar pour restituer la portée de cette étape éditoriale dans son parcours d’artiste. Plus qu’un carnet de sketchs, le jeune graffeur franco-espagnol, fasciné par les fantômes de la ville, revisite dans ce livre d’art tous les thèmes qui font son style graphique si percutant.

Fresque et sketchs de Bebar, exposés à la Galerie Nanoh, photo Baptiste Le Guay

Singular’s : Qu’est-ce que représente la sortie de ce BlackBook aujourd’hui ?

Bebar : C’est la cristallisation de nombreuses années de travail. Sans mauvais jeu de mots, c’est une page que je tourne et je peux passer à autre chose désormais. C’est aussi une partie de mon travail que l’on ne voit pas forcément car mes dessins sont en noir et blanc alors d’habitude que je les numérise pour les passer en couleurs ensuite .

Comment parlerais – tu de ton univers, et des différentes influences qui ont forgées ton style ?

Je m’inspire d’un mélange d’influences Cartoon avec les personnages que je dessine. J’adore les dessins animés de Tex Avery, Cartoon Network et les Studios Fleshman aussi qui sont plus anciens. J’aime leurs personnages qui ont des expressions exagérées. J’apprécie également Charles Burns pour ses bandes dessinées illustrées en noir et blanc.

Mon style est très saturé, presque illisible, il y a un prisme de lecture qui est totalement libre. Par mon dessin figuratif, j’arrive à être de plus en plus illisible, la lecture est à mi-chemin entre figuratif et abstrait. Le travail dans Black Book se concentre sur la partie figurative alors que je suis plus connu pour mes travaux abstraits où je mélange et cache des éléments. Ici nous avons les deux opposés entre le mur abstrait et mes cartoons. A la base, mes lignes de construction et mes traits, ça vient de mon figuratif avec les têtes qui tirent la langue par exemple.

Blacksterdam, de Bebar figure dans son Black book, Photo Baptiste Le Guay


BlackBook pages intérieures signées Bebar

Comment s’est déroulé le parcours ce BlackBook ?

J’ai fait cinq ans aux arts décoratifs en 2016 et je suis parti étudier à New-York. Il y a pas mal de dessins qui viennent de cette époque-là, c’était important pour moi de les cristalliser dans un livre pour pouvoir passer à autre chose. Je ne les avais pas vraiment montrés, c’était dommage de seulement mettre un post sur Instagram, ça n’a pas grand intérêt.

L’idée m’ai venue lors d’un examen pendant mes études, j’ai commencé à réunir pas mal de dessins. Au bout de six années, j’en ai réuni une quantité assez conséquente pour pouvoir créer un ouvrage et le rythmer dans une édition. C’est bien beau d’avoir des pages mais l’articuler sur un livre ce n’est pas la même chose. J’ai un style très compact, il faut arriver à le faire respirer.

Casa de la revolución, de Bebar, Photo Baptiste Le Guay

Tu fais du tatouage dans un salon, comment le tattoo t’inspires pour dessiner et inversement ?

Tous les médiums s’influencent les uns sur les autres. Je ne comprends pas pourquoi certains veulent les séparer, alors que c’est une richesse en plus. Tes murs influencent tes tattoos, tes tattoos influencent tes dessins.

Comme ce sont mes dessins en noir et blanc ça s’y prête. Il y a des gens qui me demandent mes dessins en tatouages, ils projettent mes dessins sur la peau. Ça me fait plaisir car parfois je n’y pense pas, j’ai commencé à travailler avec le dessin mais il y a certaines choses que je serai incapable de tatouer.

Quand on me demande du tatouage en couleur je refuse car je ne trouve ça pas esthétique. Je peux aimer sur les autres mais pas sur moi donc encore moins le faire sur des gens. J’ai des amis à qui j’ai fait les lignes noirs et qui sont partis se faire les couleurs ailleurs. Rires

Hijo de la luna, de Bebar, Photo Baptiste Le Guay

Est-ce que tu as commencé à dessiner avec le graff ?

J’ai commencé le dessin petit, comme chaque enfant qui se met à dessiner, je n’ai juste jamais arrêté. Après vers 13-14 ans, j’ai eu mes premières bombes de taggue, j’ai peints des RER, des tunnels, des autoroutes. J’ai commencé à mettre mon nom dans Vitry, ce n’était pas tout de suite Bebar, au début c’était Batar, mais le nom était déjà pris par un ancien du coup j’ai vite changé. Rires

Le graff c’est une école, je pense que cela m’a donné une certaine légitimité.

J’y étais dans la rue donc quand j’ai vu des « artistes urbains » qui n’avaient jamais graffés dehors, je me suis dis que moi aussi je pouvais le faire. Le street art s’est démocratisé, j’ai arrêté de tagguer dehors pour en faire quelque chose de plus cadré.
Je me suis dis autant en faire quelque chose de concret vu que je sais dessiner. A la base je voulais faire des bonhommes et pas de lettres, j’étais nulle en lettre carrément. J’ai toujours dessiné un bonhomme qui tire la langue.

Propos recueillis à l’occasion de la signature à la Galerie Nanoh par #Baptiste Le Guay

Pour en savoir plus le site de Bebar

Black neuf quatre, de Bebar figure dans son Black book, Photo Baptiste Le Guay