Cinéma en salles : Emilia Peres, de Jacques Audiard
Audiard, avec une tendresse sans fard, pas feinte, de face, filme les fêlés dans les marges du cinéma traditionnel…
La transexualité dans le monde des narcos trafiquants mexicains… il fallait oser l’aborder sous cet angle ! Et ça passe…ça passe même très bien !
Entre thriller queer, comédie romantique, drame social, dénonciation politique et opéra baroque, ce film possède la grâce des histoires belles et tragiques qui t’élèvent un instant un peu au-dessus de toi !
Un changement d’identité et de genre
Manitas, marié, deux enfants, trafiquant de drogue, chef de gang, évoluant dans un univers ultra machiste, tueur à l’occasion, décide de devenir ce qu’il sent être depuis longtemps au plus profond de lui même : une femme…
Pour cela à l’aide d’une amie avocate, il disparaîtra en Suisse où l’opération aura lieu. Il y fera mourir Manitas, l’homme qu’il était, pour devenir la femme qu’il sera… Émilia Perez ! Ce changement d’identité provoquera un changement de vie.
Il créera avec son avocate une ONG pour retrouver, afin de les rendre à leur famille, les corps des hommes disparus, assassinés par les cartels de drogue au Mexique. Il fera venir en Suisse sa femme et ses enfants qui ignorent tout de sa transformation…
On est dans le double sens d’une histoire symbolique et réelle, de corps d’hommes « morts » au cœur d’un deuil familial à faire ! On pourrait presque dire que c’est le récit d’une rédemption par le féminin…
La formidable actrice espagnole transexuelle Karla Sofia Gascon qui incarne Émilia Perez est tout simplement magnifique.
Le masculin et le féminin font ici indéniablement bon ménage.
« C’est au fond, une histoire de rachat : est-ce que le fait de changer de genre peut faire percevoir différemment la violence des hommes ? Fondamentalement, je ne pense pas. Que le personnage d’Emilia se joue ce scénario avec conviction, soit, mais la violence la rattrape quand même. C’est le chemin qui la conduit à sortir de ce cercle de violence qui est en lui-même vertueux.
A l’arrivée, qu’on y laisse sa peau ou qu’on y survive, on a appris quelque chose. »
Jacques Audiard.
À voir absolument !
Musique : Clément DUCOL et Camille
Chorégraphie : Domnique Jalet