Cinéma en salles : L’été dernier, de Catherine Breillat
Scénario et dialogues : Catherine Breillat, avec la collaboration de Pascal Bonitzer
D’après le film Queen of Hearts, écrit par Maren Louise Kaëhne et May El-Toukhy, réalisé par May El-Thoukhy
Entre thriller et conte amoral, L’été dernier, de Catherine Breillat plonge dans une passion explosive, nourrie d’un désir scandaleux, qui happe Anne (Léa Drucker) et Théo, son beau-fils (Samuel Kircher). Au-delà de la transgression déjà vue de Madame Bovary au Le Souffle au cœur, Léa Drucker produit toujours sur lui, une mystérieuse attraction, très probablement d’origine lunaire. Patrice Gree aimé ce film qui bascule dans le noir et dit un autre scandale que celui de l’adultère …celui des mensonges, le déni des hypocrites.
L’art moraliste enlaidit et rétrécit les gens. Mais l’Art est moral car il les embellit, porte un regard sur eux qui les épanouit, les transfigure.
Catherine Breillat, dossier de presse de L’été dernier
« L’été dernier », c’est l’histoire d’une femme de caractère, avocate, très maitresse d’elle-même qui mène en province une vie bourgeoise où le confort et l’ennuie finissent par se confondre !
Elle s’appelle Anne. Son mari, Pierre, au physique d’édredon, toujours un peu en retrait, aimant, semble écrasé par de sérieux ennuis professionnels (Olivier Rabourdin) ! Père attentif et affectueux de deux petites filles adoptées, il décide, de faire revenir à ses côtés, suite à des actes de violence contre un professeur dans son lycée, Théo, son fils de 17 ans, élevé exclusivement par son ex-femme. Théo en fin d’adolescence, en souffrance – superbement interprété par Samuel Kircher – est un fils rebelle, qui rejette violemment son père. On devine sans que ce soit dit explicitement que l’absence de ce dernier a nourri jusqu’à plus soif, ce rejet ! Anne, est troublée par Théo. Sa jeunesse, sa beauté, son désarroi, une forme de violence aussi peut-être, qui tranche avec l’épais silence de son mari.
Il y avait un abandon absolu de part et d’autre, on travaillait en symbiose, j’étais eux, ils étaient moi, ils étaient à moi. Je dis toujours que mes acteurs sont ma pâte à modeler. (…)
Le sexe est un enjeu de pouvoir, que les religions combattent parce que, justement, il fait concurrence à la religion. On veut trop souvent réduire la chair à des plaisirs salaces, parfois un peu charmants, mais quand même toujours triviaux. Moi, je veux filmer cette extase divine, quand on atteint le corps transparent.
Catherine Breillat, dossier de presse de L’été dernier
Théo, c’est un pas de côté… Un faux pas qu’elle s’autorisera. Peut-être le dernier, avant d’agiter son mouchoir !
Théo, fragile et provocateur connaît son pouvoir de séduction. Une relation tendre, joueuse puis amoureuse s’engage… et le chaos alors, s’enclenche !
Le désir est un magnifique chat sauvage, qu’en danger, Anne tentera vainement de faire rentrer de force dans sa cage. Le désir malgré ses conséquences prévisibles…résiste ! Il se vit sans prudence. La liaison est découverte par la sœur d’Anne. Anne paniquée veut rompre, Théo s’enfuit et révèle tout à son père. Obéit-il à un désir de détruire son père en révélant sa liaison avec Anne ? Et c’est là où le film bascule dans le noir et dit un autre scandale que celui de l’adultère avec un beau-fils… celui des mensonges.
Je suis un voyeur et un voyant. J’aime voir l’âme humaine dans ses moindres tressaillements, je trouve son ambiguïté d’une beauté absolue. (…) Mettre en scène, c’est inventer les mouvements justes pour le film, même si ce n’est pas la vérité de la vie.
Catherine Breillat, dossier de presse de L’été dernier
Cette relation toxique provoque un chaos général, révélant la noirceur des personnages qui se débattent pour se protéger du scandale !
Terribles mensonges d’Anne la manipulatrice amoureuse qui nie et enfonce Théo tout en profitant de lui jusqu’à la fin. Terrible mensonge de Pierre le mari qui voit, sait, refuse de voir et de dire ! « tais-toi, tais-toi » dit-il à Anne. Les adultes mentent pour se protéger ! Théo, le perturbateur, celui par qui le scandale arrive est finalement le seul à dire la vérité…Vérité contre mensonge, adultes contre ados.
J’ai aimé ce film pour l’ambivalence des personnages, pour le jeu des acteurs filmés dans la lenteur, caméra au poing, au plus près des émotions violentes et contradictoires qui les traversent … formidable Léa Drucker.