Cinéma en salles : Ma langue au chat, de Cécile Telerman
Dans la catégorie des comédies douces amères…
Si la forme est souvent drôle, le fond a cette petite tonalité cruelle, qui nous parle et lui donne une saveur particulière. Le sujet aborde le cap Horn de l’âge : le passage de la cinquante-soixantaine … Ce moment où une bascule définitive s’opère dans ta vie. Les couples sont fatigués, les corps sont fatigués, les parents meurent, les enfants partent…le décor reste ! Mais ce n’est plus du tout la même pièce qui s’y joue !
J’ai fait ce film pour tout le monde, mais surtout pour les gens de ma génération,
pour leur dire que, même si l’horloge a tourné,
et que beaucoup d’entre eux ne se reconnaissent plus dans le monde actuel,
ils ont encore des choses délicieuses à vivre et des bons moments à passer avec leurs proches,
et que l’âge n’a pas grand-chose à voir avec l’amour et l’amitié.
Cécile Telerman, réalisatrice de Ma langue au chat
Un matin en sortant de la douche, le seigneur se découvre sénior.
L’homme a du mal à se reconnaitre. Il se regarde dans le miroir comme on se dit adieu sur un quai de gare désert ! Le gras guette, le cheveu tombe…et en plus sur un plan érectile, le soleil ne se lève plus tous les matins ! Et ça le rend triste, l’homme, car l’homme même quand le soleil se levait pour rien…il rayonnait ! Il éprouvait alors un sentiment de fierté, qu’il s’expliquait mal mais auquel il tenait énormément, énormément !
L’homme est ainsi : c’est un couillon. Il faut l’aimer quand même !
Mais les hommes ne sont pas le sujet du film – ou du moins pas au premier coup d’œil – et encore moins les chats ! Le sujet, c’est la perte….que la disparition du chat symbolise.
Qu’est-ce qu’on perd, en gagnant de l’âge ?
Laure – Zabou – chef d’entreprise en faillite, déprime dans sa belle maison. Elle parle mieux et plus à son chat qu’à Daniel son mari, prof à la Sorbonne, que Pascal Elbé incarne avec un embarras amusant et crédible ! Daniel fait des recherches sur internet pour savoir si la ménopause ne serait pas responsable à tout hasard – plutôt que lui, ça l’arrangerait – de la mauvaise humeur permanente de sa femme.
Pour le week-end , des amis tout sourire se pointent avec leurs problèmes personnels ! Et le drame arrive : Max, le chat, disparaît …. Max, le confident. Max, l’aimé. Max, celui sur lequel le temps qui passe glisse comme la pluie sur les plumes d’un canard. Le chat, comme les chiens, semble se contenter et même se satisfaire d’une vie où il ne se passe pas grand-chose, voir des fois, rien !
Comme j’aime les gens, je les regarde et les écoute (…) ils constituent toujours la matière première des personnages de mes films. C’est une matière première formidable, parce que vivante, complexe, et toujours renouvelée, chaque être humain étant différent.
Cécile Telerman, réalisatrice de Ma langue au chat
Le pif est le fil conducteur de leur vie sobre !
L’ennui est au cœur des activités de l’animal domestique. La permanence de l’animal apaise le maître… En plus ces merveilleux imbéciles à poil t’aiment tels que tu es. Sympa, joyeux, dépressif ou gros con, ils ne font pas la différence. C’est en ça que l’animal domestique est un petit Dieu ! Il t’aime à ta place.
Max en disparaissant fera apparaître en plein jour les dysfonctionnements de chacun. Le couple explose, les amis implosent. Pour ne pas être soupçonné d’avoir écrasé le chat, chacun accumulera les petits mensonges…qui finiront par révéler la part sombre que chacun masque. On rigole souvent.
Ma langue au chat n’est pas un chef-d’œuvre, c’est juste un bon film. Et un bon film, c’est déjà pas mal !