Cinéma en salles : Wahou !, de Bruno Podalydès (2023)

Avec Karin Viard, Bruno Podalydès, Sabine Azéma, Eddy Mitchell, …

Les Podalydès ne sont pas frères pour rien, de film en film ils marchent d’un même pas…de côté, dansant, poétique et lunaire ! Autrement dit, leurs personnages toujours à côté de leurs pompes ont un charme fou ! Leurs films aussi ! Patrice Gree a aimé Wahou !, la comédie à sketches sortie mercredi en salles mettant en scène des agents immobiliers. Le film nous ramène, mine de rien, à l’aide de la comédie, un peu déjantée à la signification d’un lieu, à ce qu’il dit de nous, de nos rêves et de nos angoisses… ou comment les maisons nous habitent !

On a tous le droit d’être propriétaire, mais est-ce que le bonheur passe par là?
Dialogue de Wahou !

Mon père, sous-off dans l’armée de l’air – y avait-il un lien ? – acheta en 64, à 300 mètres des pistes d’atterrissage de l’aéroport d’Orly, un pavs de banlieue. J’ai passé mon enfance au doux son des caravelles Air France et des 747 de la Pan Am, dans une très forte odeur de kérosène international. Aujourd’hui encore lorsqu’il m’arrive de prendre la 7, en passant sous l’immuable bâtiment Orly Sud, j’ouvre en grand la fenêtre conducteur de ma bagnole…

L’odeur des hydrocarbures me bouleverse ! Chacun sa Madeleine !

On n’a pas tous la chance d’être né Proust et d’avoir eu une tante Léonie à Combray…Sorti de l’épouvantable tunnel, parfois obéissant à un tempérament indécrottablement porté à la mélancolie, histoire d’alimenter ce délicieux mal, je pousse la petite Toyota, vers la maison de mon enfance…au 16 de la rue Pierre Curie à Athis-Mons !

Je regarde la maison où j’ai vécu de 6 à 18 ans…et 46 ans après sa vente, en apercevant des inconnus à l’intérieur, je me dis « Mais sacré bon Dieu d’bon Dieu – oui je me parle comme ça – qu’est-ce qu’ils foutent… chez moi ? » Pour mon père, d’origine modeste, l’achat d’une maison était le point culminant de sa vie. Il avait rempli son devoir préhistorique d’homme : mettre à l’abri sa famille nombreuse.

(Se) mettre à l’abri ?

C’est en partie et en l’étirant sur les bords, le sujet du film de Bruno Podalydès… L’achat d’une maison, ce n’est pas rien ! Et la vente, c’est pire… L’achat d’une maison, c’est une naissance, la vente…une mort !

Fermer les volets d’une maison que l’on vient de vendre, c’est fermer les yeux d’un mort !  Quelle tristesse…
À l’inverse ouvrir les volets d’une maison que l’on vient d’acheter, c’est un l’accouchement d’une nouvelle vie ! Quel bonheur…

Les Podalydès ne sont pas frères pour rien, de film en film ils marchent d’un même pas…de côté, dansant, poétique et lunaire ! Autrement dit, leurs personnages toujours à côté de leurs pompes ont un charme fou ! Leurs films aussi ! J’ai aimé la jolie comédie Wahou !

Karin Viard, Bruno Podalydès, deux agents immobiliers, dans Wahou !, de Bruno Podalydès (2023) Photo Anne Francoise Brillot UGC Distribution

La transaction immobilière est un formidable territoire de comédie. Il ne s’agit pas d’égratigner quiconque mais de révéler la nature humaine de manière ni angélique ni diabolique.
Bruno Podalydès, auteur-réalisateur de Wahou !

Oracio, joué par Denis Podalydès, est conseillé immobilier… il en les tics de langage ! Ces phrases toutes faites, lisses et plus ou moins brillantes comme un vernis à ongles de chez Monop. Mais consciencieux, il a aussi de l’éthique qu’il manifeste en accompagnant patiemment dans leurs désirs ambigus, leurs besoins contradictoires, leurs infernaux doutes et leurs angoisses chiantes…sa clientèle.

Eddy Mitchell et Sabine Azema dans Wahou !, de Bruno Podalydès (2025) Photo Anne Francoise Brillot UGC Distribution

Se projeter dans l’avenir

La diversité de cette clientèle en âge, en moyen, en milieu et en psychologie offre un joli panel des enjeux pour chacun d’un achat de cette importance… Acheter une maison, c’est se projeter dans l’avenir… certains couples choisissent ce moment-là pour appuyer sur le bouton qui fera tout exploser ! Ce film sans prétention, n’est pas sans ambition. Il nous ramène, mine de rien, à l’aide de la comédie, à la signification d’un lieu… à ce qu’il dit de nous, de nos rêves et de nos angoisses. Comment les maisons nous habitent ?

Et puis il a la merveilleuse, la délicieuse, la malicieuse et l’unique et si belle Sabine Azéma, en éternelle jeune fille !

#Patrice Gree