Cinéma : Tenet, de Christopher Nolan (2020).
En salles depuis le 25 août.
Un thriller dont l’action aux relents métaphysiques donne le tournis
Très attendu est un euphémisme tant Tenet le dernier film de Christopher Nolan a suscité de questionnements. Que ce soit lors de sa gestation sur son mystérieux script ou sur sa date de sortie plusieurs fois repoussée. Alors que ce temps d’expectative est maintenant terminé, nous pouvons affirmer que l’attente était méritée.
Oui Tenet est un film à la forme narrative complexe dont l’enchevêtrement scénaristique est passionnant. Cette structure à l’apparence d’un puzzle kaléidoscopique en perpétuel mouvement temporel, nécessitera d’y plonger plusieurs fois avant de pouvoir en élucider tous les ressorts. Christopher Nolan confirme encore qu’il est un des plus grands réalisateurs actuels…. à savourer en salles.
Une virtuosité cinématographique hors norme
Virtuose dans tous les sens du terme, Tenet est un véritable dédale dramaturgique aux nombreuses questions cryptées. Il générera sans doute autant de débats que ceux qui ont suivis la sortie et le destin de “2001 Odyssée de l’espace”. Nolan avait déjà prouvé sa capacité à nous perdre dans le cheminement du temps et éprouvé nos dispositions à nous y retrouver. Dès son premier grand film “Memento”, ensuite avec “Inception” puis “Interstellar” il avait déjà sérieusement tordu le cou aux aiguilles de l’horloge du temps.
Ne cherchez pas à comprendre, fiez-vous à votre sensibilité
Certains, espérons une minorité, n’y trouveront que vacuité cérébrale et mal de crâne. Pourtant tel un petit poucet, comme à son habitude, Christopher Nolan sème des petits cailloux pour nous indiquer un chemin. Au début du film une scientifique, dit à peu près textuellement, je cite de mémoire, au personnage principal à qui elle explique le principe de l’inversion du temps, “ne cherchez pas à comprendre, fiez-vous à votre sensibilité”. Cette phrase, apparemment anodine, me paraît centrale. Nolan souhaite avant tout que le spectateur s’immerge mentalement au fin fond de son labyrinthe narratif avant de commencer à vouloir en comprendre tous les tenants et les aboutissants.
Il s’agit là finalement d’une façon de recréer la complexité infinie de nos réalités.
Des effets spéciaux et un casting éblouissants
Véritable artificier bénéficiant d’un budget de 200M$ le réalisateur britannique réfractaire au numérique, déploie des effets spéciaux à la pyrotechnie éblouissante. Il maîtrise également l’art d’échafauder un casting. La révélation du film est sans aucun doute John David Washington qui n’a vraiment plus besoin de se faire un prénom puisqu’il en remontre à son père Denzel.
En incarnant un agent de la CIA d’un flegme éloquent il invoque la stature d’un James Bond hors norme, à la moralité rigoureuse et la poigne acérée. Robert Pattinson n’a plus à montrer qu’il est un très grand acteur. Personnage à la décontraction bienvenue il se forge un rôle à sa mesure tout en répliques naturellement éloquentes. Elizabeth Debicki entre enfin dans la lumière grâce à un rôle à sa hauteur quant à Kenneth Branagh, il est parfait dans son rôle d’oligarque russe dont la volonté d’anéantissement rappelle son rôle de Viktor Cherevin dans le passable “Ryan Initiative” qu’il avait d’ailleurs lui-même réalisé.
Même si en ne dévoilant pas grand chose je vous dis que le Futur est mal en point, qu’il n’est pas content et en veut monstrueusement à notre Présent, vous l’avez sans doute compris, “Tenet” ne se raconte pas, mais se partage. Il faut aller voir cette époustouflante démonstration que le cinéma reste aujourd’hui un médium extraordinaire. Comme le dit notre héros “le protagoniste” en découvrant l’expérience de l’inversion du temps “Wouah”. Surtout en Salles.