Fine Arts Paris La Biennale parie sur l’émerveillement (Carrousel du Louvre)

Jusqu’ au 13 novembre 22, Fine Arts Paris La Biennale, Carrousel du Louvre, 75001 Paris, entrée : 20 euros.

En réponse à l’appétit des foires internationales sur Paris, Fine Arts Paris La Biennale, fusion de La Biennale des Antiquaires, créée en 1956 et Fine Arts Paris (2018) sonne la résistance avec un magnifique rassemblement de trésors proposés par de plus 86 exposants jusqu’au 13 novembre au Carrousel du Louvre. De l’art antique à l’art contemporain en passant par les arts décoratifs et la joaillerie, le collectionneur y trouve un vertige d’émerveillements dans une atmosphère de volupté maitrisée. A quelques mètres, la monumentale exposition du Louvre sur Les Choses, dédiée à l’objet, de plaisirs comme de vanités constitue un contrepoint réflexif.

Une minutieuse mise en scène et en regard

Dans les travées du nouveau salon au nom hybride Fine Arts Paris La Biennale, bruisse un souffle de résistance de cette alliance stratégique pour s’imposer face à une concurrence exacerbée, entre autres, des puissantes Frieze Master (Londres) et Tefaf (Maastricht). L’enjeu n’est ni plus ni moins de proposer « le plus bel évènement international à Paris pour les arts de l’Antiquité à nos jours » selon son président Louis de Bayser. On en mesure le défi mais déjà le Salon a su convaincre de nombreuses galeries internationales qui ont mis les bouffées double pour répondre aux attentes.

Le XVIIe rayonne au Fine Arts Paris La Biennale 2022 Carrousel du Louvre Photo OOlgan

La séduction et le prestige du Carrousel de Louvre donne une chance supplémentaire au rendez vous de s’imposer (même si c’est l’accès au Grand Palais Ephémère qui est convoité). Dommage parce qu’on n’y retrouvera pas entre les murs de l’ancien Palais du Louvre, cet air de volupté tranquille qui saisit le visiteur dès l’entrée !

Les voluptés de l’art flamand de la Galerie Florence de Voldere est à Fine Arts Paris La Biennale 2022 Carrousel du Louvre Photo OOlgan

Bienvenue dans une caverne d’Ali Baba éphémère !

La mise en scène somptueuse (signée Jacques Garcia) renforce les efforts de présentation de l’ensemble des 86 exposants. Le visiteur ne sait plus parfois où donner des yeux tant les cumuls d’objets soigneusement sélectionnés fascinent ! Compte tenu de la densité du parcours, un sentiment de trésors à perte de vue. Et les émerveillements quelques soient ses affinités sont permanents. Et rend pour tout amateur de belles choses le rendez-vous déjà incontournable tout en participant à un enjeu de souveraineté nationale !

L’art ancien est présent à Fine Arts Paris La Biennale 2022 Carrousel du Louvre Photo OOlgan

Les émerveillements d’un cabinet de curiosités

La volonté des organisateurs est bien d’en imposer dans tous les « sens » des enjeux ;  géographiques avec tous les arts extra-occidentaux (antiques asiatiques chez Christophe Hioco) , temporels  (de l’art antique à l’art contemporain (Opera Gallery, RX et Christophe Gaillard) voir décoratifs, de la bijouterie (sept joailliers) à la bibliophilie (Camille Sourget). Les arts décoratifs du XVIIe au XXe siècle y retrouvent aussi tous leurs fastes

L’art le plus contemporain est aussi à Fine Arts Paris La Biennale 2022 Carrousel du Louvre Photo OOlgan

Est-ce utile de préciser que des tendances de marché s’esquissent : la présence constante des arts antiques et premiers (Didier Claes ou Julien Fla), le retour en force (déjà constaté à Paris Basel) des créateurs et peintres du XIXe siècle et du début du XXe, et de l’école de Paris, … ce qui compte pour le visiteur est de découvrir en un seul lieu, d’admirables trésors loin des considérations du marché. Pour se remettre de tant d’émerveillements, un passage à l’exposition Les Choses du Louvre ouvre une stimulante réflexion sur les « choses »

La magie de Cabinets de curiosité surchargés d’objets émerveille au Fine Arts Paris La Biennale 2022 Carrousel du Louvre Photo OOlgan

L’exposition Les Choses du Louvre constitue un contrepoint réflexif stimulant

Van Reymerswale, Le collecteur d’impôts v.1646, clin d’œil de la commissaire Les choses au Musée du Louvre)

Après un ouvrage dense, érudit et décapant, Pour en finir avec la nature morte (Gallimard) Laurence Bertrand Dorléac a obtenu une carte blanche (et les moyens) du Louvre jusqu’au 23 janvier 23 pour le métamorphoser en une monumentale et foisonnante exposition, convoquant près de 180 objets tout médiums confondus.

Le passage du livre aux cimaises gagne en évidences même si l’ampleur étourdie, tant elle couvre et touche des aspirations contradictoires : le sentiment de l’abondance versus la frugalité, le raffinement versus la frugalité, la sérénité versus le chaos, l’unicité versus la variété… « On peut y sentir le réel comme son étrangeté, l’instabilité du monde comme sa permanence » glisse la commissaire à la fascination pour les choses toujours en alerte.

Si son ambition est intacte (transformer notre regard sur la ‘nature morte’ en général et les animaux en particulier), le propos se concentre sur ce que les « choses disent de nous » , des représentations de l’art égyptien à l’art le plus contemporain. Egratignant tout en y cédant la logique d’accumulation et d’ostentation qui s’infiltre pour le meilleur et le pire dans tous les cadres de l’art occidental… que tente de contrebalancer l’omniprésence des vanités : du squelette à deux cruches mosaïque pompéienne datant du 1e siècle avant notre ère considérée comme le plus ancienne connue, au porte bouteille de Duchamp, ici réévalué…

« En donnant une forme aux choses de la vie et de la mort, les artistes parlent de nous, de notre histoire depuis toujours : de nos attachements, de nos peurs, de nos espoirs, de nos caprices, de nos folies. Il suffit pour les écouter de regarder attentivement ce qu’ils ont créé. » insiste dans le somptueux catalogue qui offre un « chosier » abécédaire confié des dizaines d’écrivains…

L’ambition de l’exposition Les choses vise à revoir l’Histoire de la Nature morte en général, et notre rapport à l’animal en particulier (Musée du Louvre) Photo OOLgan

Cet appel à la frugalité peut-il être (encore) entendu ?

#Olivier Olgan