Joël Leick, L'image Latente (Rachel Hardouin 15martel)
« Quelques fois je travaille directement sur le motif, c’est-à-dire le lieu choisi de mes empreintes. J’imprime le sol ou les rochers, ainsi les livres se déploient et forment un horizon à nos yeux. »
Joël Leick
Le fil conducteur du style Leick : L’ image latente
A travers les épreuves du temps et l’épreuve des différentes techniques, les œuvres présentées jalonnent les imaginaires déployés par l’artiste sur plus de trente années de création. Portées par les mots de poètes ou les siens, elles piochent dans plusieurs séries, ou la photographie et la gravure se frottent ou s’accolent, au sens propre. Elles sont devenues identitaires de sa quête humaniste, de son attachement à la question du paysage et aux éléments narratifs rendus frontaux par la pratique quotidienne de la photographie, du collage et de la gravure.
« L’image latente si chère à Joël Leick est un instant suspendu, un geste, un pas, un regard, un mouvement du corps, un mot posé sur le grain du papier d’un geste pictural enlevé et baroque à la fois. Un instant anodin d’humanité, perceptible via le flou de l’image dont seule l’exposition à la lumière ou à un regard attentif prend vie et surprend par sa fugacité. »
Rachel Hardouin, galeriste
Les territoires d’un arpenteur de signes
La feuille de papier – qui peut devenir livre d’art ou affiche – constitue le tremplin d’expression de celui qui est autant “un peintre qui écrit et un photographe qui grave”. Ce support de prédilection – qui n’interdit rien ni toutes les expressions – permet de franchir le seuil des images toutes faites pour outrepasser les assises du beau, en rectangle choisis afin d’en proposer l’ellipse.
Leick dépose des brassées de lumière, des brins de joie là où pourrait germer la mélancolie, afin que les rebuts qui attristent enchantent à nouveau l’espace que l’artiste reconfigure. Se servant de pacotilles et fragments incisifs de peinture, il crée des passages incongrus.
Les poètes dont il habille les mots l’intègre dans leur cercle
Il y a chez Leick cette attention rare portée à un présent en mouvement. S’en saisir requiert une disponibilité de chaque instant. C’est cette manière de travailler dans l’instant, au contact d’un réel scruté au plus près d’une actualité, des mots, le frottement du corps en contact avec la rugosité du monde…. Et puis sa gestuelle rapide, précise, qui longtemps contenue explose soudain. Son territoire est toujours en devenir, en mouvement, en rémanences. Il se déplace au gré des inflexions de la voix, des déclics de l’appareil photo, des trajectoires de la marche
Eric La Casa
« Hic & Nunc Samedi.- Glue, pluie. Il arpente les rues de Paris – de celles qui restent à découvrir dans l’ inconstance de la méconnaissance. Il ne cherche pas une langue, il traque un sujet, un corps en quelque sorte – ce qui précisément ne se donne à aucune langue, n’aboutit à l’ avènement d’aucun geste dont on pourrait affirmer qu’il se donne pleinement.
Il se confie à l’exigence du temps et à la rondeur de la terre – il ne revendique de la mort que le premier acte (les autres ne figurent pas dans l’ ordre de ses compétences ), il regarde droit devant lui et ne distingue rien d’autre que ce qu’il a décidé de voir Bernard Noël : l’extrême présent.
Le geste de Joël Leick a l’air pudique, et sans doute l’est –il mais avec la gravité d’un engagement enfantin, c’est-à-dire total.
D’ailleurs, regardez Joël au moment de l’acte, qui est son langage. Vous voyez l’attention suspendre la vie puis, brusquement, la répandre au bout de la main tendue. Vous comprenez alors – mais il s’agit d’une sensation précédant la pensée – que voilà l’instant d’un excès. Ou si vous préférez, l’instant où la relation du corps et du papier atteint l’intensité maximum dans l’échange de l’éphémère du vivant contre le durable de l’exprimé.
René Quinon
On comprend qu’à ce point la peinture ne cherche pas à parfaire par l’adjonction de la langue quelque chose de léché, mais, qu’à l’inverse elle tente de défaire ce qui est trop construit et maîtrisé autant dans le domaine de l’art que de la littérature. Et cette dimension prend aujourd’hui un autre relief au moment où – justement – le créateur ne se contente plus de « reliefs » ou d' »états » mais qu’il met en branle le fonctionnement directe de cette charnière peinture/écriture.
Jean-Paul Gavard-Perret
« Définitivement apposée, amarrée, ligotée… l’empreinte de Joël Leick. Pas de .direction.
Elle traverse impertubablement une marge et rien sous elle repose. Qu’importe alors qu’elle soit humaine, minérale, végétale… Elle est là. Flotte sur la distance. Elle n’est pas la trace de qui est passé, passe ou passera. Ou — à l’extrême — elle est la trace d’un rien qui s’avise, en un ultime écart, d’être la trace de sa propre trace. La trace d’une chute.
Le double retournement Joël Leick, d’un unique coup de pinceau, a tracé une bande médiane d’acrylique en lavis de gris aussi léger qu’un bleu. Avec des buées d’un ocre lumineux. La couche très liquide ne couvre que pour découvrir et animer le grain du papier . L’humide a survécu au séchage.
Dépliée dans toute son extension la coulée n’est pas monotone.
Les reflets d’ocre à la fin se mêlent intimement au gris. Si l’on feuillette page à page, le cercle au contour net apparu sur la première double page, se défait sur la seconde, se dissout sur la troisième, sur la dernière disparaît à peu près dans le flux. Il se présente toujours au même endroit comme un nageur immobile qui ne coule pas, n’avance pas. Qui flotte forcément sur le dos et finit comme en un lointain par se dissoudre dans l’espace. Le récit est trop clair. Plus de place pour le poème.«
Philippe Denis
L’image latente de Joël Leick est invisible à celles et à ceux qui ne savent pas observer et surprendre ce moment, véritable présent de vie, imprévisible et gracieux.
Une figuration « en devenir », un chemin faisant entre le monde urbain et le monde de la nature, une quête du présent et un désir d’immortalité.
Rachel Hardouin, galeriste
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