La Fondation Giacometti, un vrai musée réouvert à Paris
Réservation obligatoire – 1éres dates disponibles à partir du 28 mai.
Créneaux horaires précis limitées à quatre jours par semaine (du jeudi au dimanche) et de 11h à 17h.
Fondation Giacometti, 5, Rue Victor Schoelcher, 75014 Paris
https://www.fondation-giacometti.fr
Seulement 10 personnes avec le port du masque est obligatoire pourront toutes les vingt minutes découvrir l’atelier reconstitué de la rue Hippolyte-Maindron où le sculpteur est resté 40 ans (1926 – 1966) immortalisé par de nombreux photographes (Burns, Brassai, Wolf, …) et l’exposition temporaire « A la recherche des œuvres disparues » prolongée jusqu’au 21 juin 2020.
Disparues ? Pas totalement.
« L’artiste a laissé de précieux témoignages ou traces documentés même si les sources sont d’une fiabilité « relative » » souligne la commissaire Michèle Kieffer qui dirige aussi le catalogue. Loin de la légende qui « veut ainsi que Giacometti, hanté par le doute, détruisait ses œuvres au fur et à mesure qu’il les réalisait. (..) L’analyse de ces années 1920-1935 permet en outre de constater que la destruction volontaire est en réalité rarement la seule explication de leur perte. Nous sommes ainsi face à une typologie variée et complexe d’œuvres « disparues » et pas toujours de la main de Giacometti, loin s’en faut ».
Une enquête inédite, minutieuse et savante
Il a fallut de plus deux ans sur reconstituer les tâtonnements créatifs du sculpteur (1901-1966) au cours de ses années de formation parisienne. Perpétuel insatisfait, il expérimente beaucoup, il réalise environ 140 œuvres dont 48 ont disparu. Car il « détruit probablement autant ». Il tâtonne pour trouver sa voie entre le classicisme, les réminiscences du cubisme, la découverte des arts extra-occidentaux et ses premières œuvres surréalistes… Le parcours se concentre sur plus de 70 œuvres qu’elle éclaire avec tous les documents disponibles – sculptures de référence, dessins, croquis inédits – et beaucoup de photographies – proposant des reconstitutions. Des œuvres inédites, méconnues, perdues, vendues ou endommagées ressuscitent ainsi au fil de ce bouquet d’indices, dessinant en creux l’émergence si émouvante des formes d’Alberto Giacometti.
La destruction conçue comme le moyen d’un projet artistique
« Si Alberto Giacometti s’est créé un personnage mythique d’éternel insatisfait, en proie à un drame existentiel quotidien. rappelle Michele Kieffer en introduction du catalogue. De cette figure participe un geste, celui de la destruction de l’œuvre, visant à faire tabula rasa quand l’impasse créative devient insurmontable ». La pratique comme symptôme de la crise de l’œuvre est aussi constitutive de l’esthétique du XXé siècle insiste Nathalie Leleu dans sa contribution au catalogue : la destruction est « le théâtre d’un transfert de valeur symbolique entre l’œuvre et le geste qui a conduit à la renier, la dénaturer ou l’anéantir. (…) La destruction se constitue éventuellement en instrument de domination, de régulation et de régénération de la production (celle qui reste se voit confirmée par celle qui disparaît), avec ou sans violence manifeste. La dimension cathartique de l’acte ne doit pas occulter son rôle stratégique dans la gestion d’une vision et d’une carrière, jalonnées de pépites et de déchets. »
A écouter :
- Alberto Giacometti : à la recherche des œuvres disparues : L’art et la matière – France Culture
- Giacometti-mania. La Grande Table- France Culture
A lire :
- Catalogue de l’exposition, sous la direction de Michèle Kieffer Coédition Institut Giacometti / Éditions Fage, 192 p., 28 €.