Foire d’art : Menart Fair (Cornette de Saint Cyr, Paris 8e)

jusqu’au dimanche 30 mai 2021
Menart Fair, Maison de Ventes Cornette de Saint Cyr, 6, avenue Hoche – 75008 Paris sur réservation en ligne

Loin des rivalités hors d’âge, les artistes du  Sud et l’Est méditerranéen, du Levant et du Proche Orient se rencontrent à Paris. Pendant quatre jours, la Menart Fair, la 1ère foire internationale d’art moderne et contemporain du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA) offre un parcours initiatique de plus de 60 artistes sélectionnés par 22 galeries. Laure d’Hauteville fondatrice & directrice et Johanna Chevalier, directrice artistique présentent leur ambition au-dessus des stéréotypes.

Serge Najjar (Liban) Blue Escape, 2013 galerie Bessières

Pourquoi la 1ere Menart Fair à Paris (et en ligne) ? 

Laure d’Hauteville . Relativement peu connue des publics, la mosaïque artistique contemporaine du MENA est encore jeune. Plusieurs « modernes » s’y sont affirmés, maintenant reconnus internationalement et la jeune génération d’artistes contemporains est parmi la plus nombreuse sur la scène artistique internationale, soutenus par des galeries dynamiques et volontaires.

Quelle est la portée artistique et symbolique de la présence de plus de 20 galeries venues de l’ensemble des pays méditerranéens ?

Resmi Al Kefaji (Iraq), Reflexes, 2018 paper Wadi Finan Art Gallery (Amman, Jordanie)

Laure d’Hauteville . Par leur seule présence à Paris, cette relève est sans commune mesure, par sa richesse et sa diversité, son ébullition fertile, ses langages qui convergent ou se contredisent, formant un miroir inattendu du monde ! Au carrefour des codes orientaux et occidentaux, une syntaxe créative singulière prend forme sous nos yeux, véhiculée d’une façon potentiellement globale : c’est un fait générationnel, amplifié par cette lame de fond technologique qui relie maintenant dans l’instant tous les points de la planète.

A travers la sélection des galeries participantes, MENART FAIR met en lumière la fécondité, la singularité et l’originalité des scènes artistiques du MENA, aujourd’hui soutenues par nombre de musées et d’institutions renommés.

Vous exposez tous les grands ‘continents’ du MENA, comment caractérisez-vous l’art du Maghred et du Proche Orient ?

Johanna Chevalier. L’art du Maghreb est marqué par la volonté d’émancipation des artistes vis-à-vis des anciennes puissances coloniales qui les incite à créer un art plus large d’esprit. Souvent riche en couleurs, figuratifs ou abstraits, leur point commun est le regard constant qu’ils portent sur leur culture d’origine, l’exil, la méditerranée, et non plus une identité seulement locale. L’on y retrouve souvent la calligraphie arabe s’étendant vers l’abstraction avec rythmes et mouvement métissage des peuples, à la mobilité des commerçants et à la formation d’identités qui ont façonné cette région.

Reem Al Faisal (Arabie Saoudite), “Only the Lonely I”, Mono Gallery (Riyadh)

Le Proche-Orient se caractérise par des artistes qui se sont réappropriés leur quotidien chaotique et instable pour l’intégrer à leur art.
Confrontés à un devoir de mémoire, ils maintiennent en vie des événements passés et s’intéressent aux impacts à plus long terme de ces conflits sur les populations. La particularité de cette région du monde réside toutefois dans la place qu’elle accorde aujourd’hui à la religion, alors même que le monde occidental tend à s’en détacher. L’expérience de la guerre civile au Liban, le conflit israélo-arabe constituent des enjeux de mémoire dont s’emparent les artistes pour dénoncer les silences, les occultations et les non-dits. Les artistes israéliens et palestiniens tentent à travers leur art de créer les conditions d’un vivre-ensemble et évoquent les parallèles entre les deux populations. Leur particularité tient surtout à leur volonté de comprendre « l’autre »
Mais on pourrait en dire beaucoup plus sur l’effervescence artistique du MENA !

La place des femmes artistes reste souvent marginale, comment avez-vous  surmontée cet obstacle ?

Atef Maatallah (Tunisie), Le Rêveur des muses, 2019, Elmarsa Gallery (La Marsa Dubai)

Johanna Chevalier. Nous avons été très attentives à cet enjeu culturel. Les femmes représentent 40% des artistes exposés à MENART FAIR ! Il s’agit là d’un fait, pas d’une revendication et encore moins d’une proclamation. Cette proportion surprenante – accidentelle et circonstancielle – nous a simplement conduites à nous interroger sur le statut de l’artiste femme dans les régions du ME.NA. Parmi les 72 artistes présents, une trentaine sont des femmes. C’est un constat ponctuel parmi d’autres : origine géographique, période de création, figuratif vs. abstrait…

Quelques tendances émergent de la production artistique féminine du ME.NA. Il s’agirait plutôt de veines, de sources d’inspiration ou de media communs que de courants à proprement parler. Toutefois il y a là une matière suffisamment riche pour qui voudrait susciter des dialogues entre ces artistes. Nous analysons ces données pour comprendre l’offre et la demande, faire progresser nos futures éditions et donner à voir le meilleur et la réalité de cette scène artistique. Elles sont avant tout artistes, ce que vous confirmera cette première édition de MENART FAIR.