Littérature : Jacqueline, Jacqueline, de Jean-Claude Grumbert (Seuil – Points)
Soixante ans d’amour et de cigarettes.
Journal sans chronologie, écrit en vrac, dans l’état de l’auteur…
La mort de l’aimée est un immense trou pour celui qui reste et qui pour ne pas sombrer dedans le comble avec des mots.
C’est fou l’espace que prend l’absence…
Les livres qu’on aime frappent à la porte de notre histoire.
Ma mère s’appelait également Jacqueline.
En le lisant, j’ai pensé à mon père qui avait manifesté le désir de mourir avant ma mère… Plutôt mort que veuf ! Son vœu intime fut exaucé : il mourut à 90 ans. Ma mère mit trois années à écouler son chagrin et quand il n’y eut plus de chagrin…la vie s’arrêta ! A la mort de mon père, la maison perdit ses odeurs de cuisine…
Mon père n’aurait pas survécu plus de trois mois à la mort de ma mère. Terrassé par l’effroi du vide, plus, sans doute, que par le chagrin de la perte !
Montrer le rôle sous-marin du chagrin…
Si ce n’est pas un livre toujours gai, c’est un livre souvent drôle.
L’auteur de La Plus Précieuse des marchandises parle sans complexe de sa sexualité maladroite mais très intense jusqu’au bout ! Grumbert a de l’humour. Beaucoup. De l’humour juif ! Et il lui en fallait pour traverser ce siècle, où son histoire familiale, gravée dans le marbre de l’enfer, s’inscrivit au milieu de six millions d’autres noms.
C’est un beau livre.
Heureux les hommes qui ont aimé leur femme.