Parvine Curie, sculptures & œuvres sur papier (Galerie Pierre-Alain Challier)

Jusqu’au 4 juin 22, Galerie Pierre-Alain Challier,  8, rue Debelleyme, 75003 Paris
Sentier Parvine Curie, Le Jardin des sculptures, Musée d’Art et d’Histoire de Meudon, 11 rue des Pierres, 92190 Meudon

Comme ses brillantes consœurs (Hepworth, Pan, Waldberg,…) Parvine Curie s’inscrit dans une lumineuse lignée de femmes sculptrices dont la reconnaissance reste trop dans l’ombre. La Galerie Pierre-Alain Challier éclaire la puissance évocatrice d’une œuvre qui redonne à la sculpture tout son sens spirituel et sa quête d’harmonie intemporelle, imprégnée d’une ferveur humaniste universelle.

La sculpture comme signe d’éternité des choses

Parvine Curie texte Scarlett Reliquet Somogy 2010

« Prendre le temps, s’extraire des bruits pour retrouver la cellule-atelier où des rêves enfouis peuvent surgir » : Parvine Curie né en 1936 invite dans son œuvre comme elle-même l’a créée, avec humilité pour le matériau qu’elle dompte, avec attention pour les formes qui s’y cachent, enfin avec l’émerveillement pour l’harmonie qui se libère. Longuement murie, chacun des œuvres est « une étincelle de vie » que cette autodidacte essaie de saisir et transmettre à travers sa fascination pour la nature et la monumentalité.

En plus de cinquante ans de carrière, dans la discrétion et dans l’ombre du sculpteur François Stahly (1911-2006), son frère en sculpture, les formes hiératiques souvent ascétiques de ses « sculptures architectures » ne cessent de s’épanouir dans les espaces – publics/privés – où elles se fondent, exhalant « rigueur, ferveur et repliement ; mais parfois les formes s’échappent et adoptent un mouvement ascensionnel, s’enchaînent dans des attitudes baroques. » (Pierre Cabanne, 1999)

« Débris épars de l’humanité »

Parvine Curie Personnage Burkha, 2005 Photo OOlgan

Rien de plus juste que le propos de Scarlett Reliquet (Somogy éditions d’art, 2010) : « Chaque sculpture de Parvine Curie fonctionne comme une image condensée : l’escalier, la tour, la pyramide, le labyrinthe, la table, mais aucune ne se limite à cela. »

Celle qui voue un subtil culte réflexif à la nature et synthétique à la puissance de chaque matériau : bois, bronze, béton, argile et désormais de résine expriment des valeurs universelles par la résolution par une équilibre subtil de polarités essentiels.

Cette recherche d’harmonie – stabilité, durée, – est omniprésente. Qu’elles soient à l’extérieur, souvent dans des lieux hors du temps – couvent, parc jardins, … – ou qu’elles soient exposées en galerie, dans leur manière de se tenir les unes aux autres, de correspondre les unes à côtés des autres, Parvine Curie se révèle autant de « vivants piliers »

Une quête et une soif de spirituel

Parvine Curie Grand Signe, bois d’Iroko sculpté

« A chaque moment de la journée, une forme de vie éveillé est nécessaire à la survie comme le pain quotidien » aime-t-elle dire pour s’engager dans son atelier et se libérer du « connu ». Car avant de toucher et de libérer des magnifiques émotions, c’est d’abord le spirituel qu’à travers les épreuves d’ascèse ou la quête d’ architectures traversant le temps, l’artiste infatigable voyageuse cherche à atteindre.
Dans une unique qualité de silence, d’attente, voire d’éternité, toujours habitée, serait-ce par une absence, ses œuvres s’élancent au-dessus de toutes les laideurs  pour « mieux incarner les forces de l’inconscient, généreuses, protectrices mais durement silencieuses » (Reliquet).

A la recherche d’un centre. 

Parvine Curie Grand Beffroi, 1992 (bronze) Photo OOlgan

Car elles semblent comme respirer tant leurs lignes s’intègrent avec harmonie aux paysages – urbains ou floraux – ou interagissent subtilement dans un espace clos. Leurs titres en disent tout autant soit sur sa passion pour cette architecture ancienne qui s’inscrit dans l’histoire qu’elle soit romane, gothique, ou de civilisations du passé : Temple-Ile, Temple-Eau, Campaniles, Le Grand Beffroi, … Soit sur des filiations dans laquelle l’humanité aime à se resituer : Mère-Citadelle, Mère-couple, Mère-riche, …

Qu’elles que soient leur taille, leur qualité organique et leur force spirituelle nous invite à accéder à un état supérieur de la conscience, à un laisser aller salutaire. « C’est pourquoi, suggère Scarlett Reliquet, la poésie ou la littérature, permettent au spectateur de conserver une distance salutaire, une suspension nécessaire, un retrait opportun. »

Parvine Curie La poignée de mains (marbre noir et blanc) Photo OOlgan

Oublier les étiquettes

Avant de pénétrer dans la galerie, il convient en effet d’oublier vos étiquettes établies pour accepter l’invitation au voyage de Parvine Curie qui définit la sculpture comme « ces heures, ces journées d’une qualité autre où l’on crée à travers la terre, un refuge aussi une demeure, un labyrinthe, à la recherche d’un centre. »

#Olivier Olgan