Peter Lippmann photographie la fragilité de la vie (Galerie Gadcollection)
Peter est américain, comme dans les films. Un Américain avec une voix qui traine des pieds, un poil désabusé, mais qu’un sourire un brin moqueur vient contredire !
Peter Lippmann n’est pas qu’américain, il est aussi photographe.
D’abord photographe, surtout photographe… Et quand il n’est pas photographe, il met son chapeau de Léonard Cohen sur la tête, caresse Inès son braque allemand lové à ses pieds, et te chante une chanson en noir et blanc. C’est comme ça que tu passes, une très bonne soirée dans sa campagne, dans son fauteuil un peu défoncé, au coin de son feu éteint, avec un bon vieux whisky dans la main droite, un cigare dans la gauche et ton cheval sioux attaché au cerisier japonais du jardin. Dans la foulée, à la volée, entre deux photos de toi, il vire le galurin de Cohen, visse sa toque de chef étoilé, et fait frémir de plaisir poêles et casseroles en cuisine… Et là, mon gars, tu passes une triple bonne soirée. Car si Peter est très yankee quand il chante, très rital, quand il fait la cuisine, il est profondément universel quand il photographie ! Ses thèmes sont universels, et son œil très personnel !
Après avoir, pour la pub, magnifié le luxe inaccessible, il sublime le commun pourrissant.
Peter a eu le déclic pour le déclin !
Pas le déclin de l’Empire américain, non, le déclin de toute chose ! Le déclin de la vie, qu’elle soit minérale, végétale, animale, humaine…jusqu’aux objets à qui il rend leur âme au moment où ils expirent. Peter photographie la mort à l’oeuvre, la mort au boulot…Il retient par la manche ce qu’on fuit naturellement, l’éclaire, en extrait le beau du laid, faisant ainsi jaillir la lumière de l’ombre, la dignité de la dégradation. Tomates, melons, courges, concombres, navets, raisins, fleurs, mouches, guêpes, en décomposition composent ses merveilleux tableaux photographiques. Car ses photos sont des tableaux.
Son rapport à la lumière est plus proche du peintre que du photographe…
Peter est un chasseur d’ombres et de lumières.
Dans son studio, à l’affut de la lumière parfaite, il pourra attendre des jours entiers, fleurs, fruits et mouches décomposés en appâts, le bon moment, le moment parfait… pour faire clic ! Et sous le sens du tragique perce la malice ! Il est capable de t‘habiller en Dior un rouleau de PQ, juste pour la joie de magnifier le trivial ! De même il transformera des cactus effrayants en bijoux désirables, de banales pauvres poules de basses-cours, en rombières mondaines…Peter portraitiste aussi ! Mais là, c’est l’ombre qu’il ira chercher…
Une vérité à poil sera toujours plus belle que ma gueule enfarinée, couronnée d’un sourire à la con sur fond de soleil couchant.
J’adore le photographe Peter Lippmann
Jusqu’au 7 juillet 2024, Peter Lippmann, à la Galerie Gadcollection, 4 rue du Pont Louis Philippe, 75004 Paris