Sélection Jazz février 22 : Mário Laginha, David et Thomas Enhco, Avishai Cohen
Quoi de neuf en jazz en Février 22 ? Jazz enjoué ou méditatif, formations restreintes ou plus larges, notre sélection retient trois musiciens à la vision musicale stimulante. Mário Laginha nous embarque dans ses compositions travaillées aux harmonies riches. David Enhco mêle la magie du quatuor à cordes classique et du quartet de jazz. Avishai Cohen nous livre quant à lui une musique nettement plus méditative et flottante, dans l’esprit du label ECM.
Mário Laginha, Jandada (Edition Records)
Direction le Portugal. C’est dans ce pays que Mário Laginha est né en 1960. Son dernier album est intitulé Jangada. Accompagné d’une contrebasse et d’une batterie, le pianiste nous fait entendre ses 11 compositions. Il ouvre le bal avec le morceau Short Shore. Il commence seul en arborant quelques notes aigues soutenues par des accords en profondeur. Le caractère ample et flottant du début change progressivement pour devenir un petit peu plus palpable. Le rythme s’accélère grâce à des motifs répétés qui viennent accompagner le joli thème joué à la contrebasse. L’improvisation au piano n’arrive qu’à la 3ème minute. Le pianiste portugais utilise des motifs joués en parallèle (les deux mains en même temps), pour créer une montée en tension.
Globalement, son jeu est travaillé, fin et subtil ; trop peut-être ? Il s’aventure en effet bien souvent dans des gammes difficiles d’accès qui pourraient en effrayer quelques-uns.
David Enhco, Family Tree (Nome)
C’est album est, comme son nom l’indique, une véritable affaire de famille. Il est le fruit d’un riche héritage familial musical mêlant musique classique et jazz. La mère de David Enhco (1986) n’est autre que Caroline Casadeus, soprano lyrique, fille du chef d’orchestre Jean-Claude Casadeus.
Pour le jazz, on peut aisément imaginer toute l’influence que le beau-père de David, Didier Lockwood (1956-2018), un immense violoniste de jazz, a eu sur lui. C’est dans cet environnement que le jeune David Enhco grandit aux côtés de son petit frère Thomas Enhco (1988), lui-même extraordinaire pianiste. Cet album est à la croisée des chemins entre musique classique et jazz. Le quatuor à cordes communique avec le quartet de jazz mené par les deux frères Enhco. Shadow Love est une chanson composée par David Enhco à partir d’un poème d’Heinrich Heine qui rend hommage à son beau-père Didier Lockwood, disparu en 2018. La voix douce et sensible de Célia Kaméni expose le thème. Elle est soutenue par une extraordinaire improvisation simultanée des deux frères.
Ils sont en concert notamment au Bal Blomet, le 15 avril (20h00)
Avishai Cohen, Naked Truth (ECM)
Tout l’esprit du label ECM (dirigé par Manfred Eicher) est là. Avishai Cohen nous livre ici une improvisation libre, au caractère méditatif et apaisé. Les musiciens se lancent dans une œuvre spontanée, qui se construit au moment où elle est enregistrée. À la trompette, Avishai Cohen joue quelques notes immédiatement comprises et soutenues par ses acolytes : le pianiste Yonathan Avishai, le contrebassiste Barak Mori et le batteur Ziv Ravitz.
Tout l’album repose sur un subtil équilibre entre maîtrise et lâcher-prise. La maîtrise est bien manifeste ; les musiciens ont leur langage extrêmement développé et élaboré, ils savent poser un cadre propice à la liberté. C’est au sein même de ce cadre qu’ils se laissent aller à leur inspiration, au gré du vent. Ils se laissent mener par leur esprit musical, leur inspiration.