(Seul en scène) La Reine des Abeilles, de et avec Charlotte des Georges (Les Enfants du Paradis)
Mise en scène : Marie Guibourt – Scénographie et lumière : Lucie Joliot
Dans un théâtre flambant neuf rue Richer, Les Enfants du Paradis, juste à côté des Folies Bergères, le seul-en scène La Reine des Abeilles, triomphalement joué à Avignon jette jusqu’au 23 décembre une drôle de pierre dans le bain du désir d’enfant. Comédienne et auteure, Charlotte des Gorges croque avec beaucoup d’acuité et de malice, l’accélération de l’horloge biologique de la femme de 40 ans.
La Reine des Abeilles est soumise à des influences sournoises
qui la pousse dans ses retranchements
qui en font un être incontrôlable, imprévisible et terriblement attachant.
Charlotte des Gorges
Gare aux étincelles et effets secondaires
« Dès lors qu’il est question d’hormones, il est question de dérèglements, d’états seconds, d’extrême vulnérabilité, d’irritabilité et donc de comédie ». revendique Charlotte des Gorges. Sa course au désir d’enfant colle en effet à une actualité brulante et des revendications dans l’air du temps sans trop savoir ce qu’il en retourne concrètement. Charlotte des Gorges se place au niveau de l’hormone et de la pipette. C’est cru et clinique mais allume une dynamite humaine et sociétale !
Une performance de transformiste
Autant de configurations humaines, la comédienne interprète une dizaine de personnages avec une agilité incroyable. Quelques accessoires suffisent pour croquer avec gourmandise : sa grand-mère, son père, son gynécologue, son ex, sa meilleure amie….
La créatrice de La Générale de théâtre en 1999 a du métier et de l’expérience : elle a suivi une formation au Howard Studio à New-York, puis alterne cinéma, télévision et théâtre. Sa dernière pièce en date Tu seras un homme ma fille.
La mise en scène de Marie Gibourt ajoute une note de poésie avec quelques clairs obscurs qui permettent quelques excentricités. « J’ai abordé́ la mise en scène de ce solo avec l’envie de créer un écrin qui permette aux personnages de s’exprimer pleinement. Quelques éléments de décor ni tout à fait domestiques, ni tout à fait médicaux et les lumières de Lucie Joliot, tout en blancs froids et chauds, qui nous accompagnent entre intime et clinique, sensuel et médical et la création sonore, signée par François Peyrony qui nous fait voyager dans le temps, l’espace et la tête de l’héroïne » commente Marie Gibourt.
Ne pas rire idiot
La Reine des Abeilles est née à la fois de cette observation
de la société féminine moderne et de mon expérience personnelle.
Au-delà du comique exacerbé, son seul-en-scène jette pas mal de pavés dans la marre des rapports homme-femme et vers cette génération du « droit à l’enfant si je veux quand je veux » Cette course biologique multiplie les vertiges émotionnels entre angoisse et épuisement moral. Tout en ouvrant des vannes d’espoir avec la lucidité des comiques qui savent gratter où cela fait mal : « Il y a bien deux sociétés qui s’affrontent. Une société archaïque qui continue à scander « Un enfant = un papa + une maman » etc… Et une société qui a l’intime conviction que la société est à réinventer. »
Bravo à cette La Reine des Abeilles, lanceuse d’alerte et de rires !
#Patricia de Figueiredo