VOD : Trois comédies signées de Sébastien Betbeder, Pierre Jolivet et Erwan Le Duc
En cette interminable pénurie de cinéma, trois films français dans trois registres de comédie prouvent que la diversité du cinéma français reste une valeur sûre comme en témoignent : Sébastien Betbeder (Marie et les Naufragés), Pierre Jolivet (Victor et Célia) et Erwan Le Duc (Perdrix) sans oublier, l’inclassable Les Garçons Sauvages de Bertrand Mandico sur Arte
Marie et les Naufragés de Sébastien Betbeder (2016) 1h44mn
avec Pierre Rochefort, Vimala Pons, Damien Chapelle, Eric Cantona et André Wilms.
Disponible en VOD à partir de 2,99€
Siméon, un type lunaire (Pierre Rochefort, remarqué dans notamment Un Beau Dimanche, Nos Futurs) trouve un portefeuille dans la rue et s’entiche de sa propriétaire Marie, jeune femme fantasque (épatante Vimala Pons, voir Comme un Avion, Je Suis à Vous Tout de Suite, La Loi de la Jungle). Entouré d’Oscar son colocataire somnambule, Damien Chapelle (Planétarium, La Prière, Mes Jours de Gloire) et harcelé par Antoine, un romancier inquiétant, qui entre menaces et avertissements le met en garde (rugueux Eric Cantona), il va s’embarquer à la poursuite de ladite Marie sur l’île de Groix.
Après un 2 Automnes 3 Hivers remarqué par la critique en 2013, Sébastien Betbeder réalise un conte moderne. Cette poésie qui oscille entre surréalisme et dérive existentialiste est une bouffée d’air frais. Passé inaperçu à sa sortie en 2016, ce bijou romantique mérite largement de figurer au petit panthéon des comédies françaises. Accompagné d’un bande originale hédoniste comme il se doit de Sébastien Tellier, suivez Siméon dans sa quête d’un amour qui lui glisse entre les doigts.
Victor et Célia de Pierre Jolivet (2019) 1h31 mn
avec Arthur Dupont, Alice Belaïdi.
Disponible en VOD à partir de 2,99€
Un jeune coiffeur, Arthur Dupont (L’Outsider, Grand Froid ou encore Normandie Nue) rêve de monter son propre salon. Il est contraint de faire appel 10 ans après la fin de leur histoire à son ex petite amie Alice Belaïdi, (L’Ascension et dernièrement Terrible Jungle). Coiffeuse également, celle-ci est installée dans la vie ronronnante de son nouveau compagnon…
Au travers de leurs pérégrinations bancaires mais aussi purement économico juridiques mêlées d’un mélimélo sentimental, d’une façon de ne pas y toucher, Pierre Jolivet souligne l’âpreté d’un monde endurci face à des idéaux sans prétention.
Drôle et enlevée, cette comédie sociale sous couvert d’une comédie romantique n’a pas eu le succès qu’elle méritait. Et c’est bien dommage, le 17 ème film du réalisateur à succès de Force Majeure, Ma Petite Entreprise, Je Crois Que je l’Aime brille par moment de l’intelligence des grandes heures de la comédie américaine des années 30/40.
Perdrix de Erwan Le Duc (2019) 1h39 mn
avec Swann Arnaud, Maud Wyler, Fanny Ardant et Nicolas Maury
Disponible en VOD à partir de 1,49€
Juliette, jeune femme bohème, se fait dérober par une nudiste sa voiture sur une aire de repos. En déposant plainte au poste de police le plus proche, elle y rencontre Pierre Perdrix, un vieux garçon capitaine de gendarmerie. Entre ces deux êtres à l’opposé se noue une relation le moins que l’on puisse dire déroutante autant pour l’un que pour l’autre.
Tournée au fin fond des Vosges, cette comédie romantique pleine de charme burlesque au léger parfum surréaliste est un premier film qui réenchante le genre. Réalisé par Erwan le Duc, journaliste du Monde, Perdrix nous immerge au cœur d’une savoureuse digression romanesque.
Maud Wyler que l’on a pu croiser dans La Lutte des Classes ou Alice et le Maire et plus récemment Les Aventures du Jeune Voltaire sur France 2, interprète brillamment le feu follet qui va bouleverser l’existence du capitaine. Swann Arlaud quant à lui, auréolé du César du meilleur acteur pour Petit Paysan en 2018 et celui du meilleur second rôle en 2020 pour Grâce à Dieu, prête sa candeur flegmatique au personnage de Pierre Perdrix. Le rôle de la mère du héros joué ici par Fanny Ardant avec cette truculence qui n’appartient qu’à elle finit de caractériser l’originalité du propos.
En complément nous retrouvons Nicolas Maury fraîchement émoulu de la série à succès 10 pour cent.
Encore un de ces films qui aurait dû connaître les sommets du box office. Par sa finesse Perdrix ravive nos espoirs en un monde meilleur.
Les Garçons Sauvages de Bertrand Mandico (2017) 1h 50mn
avec Vimala Pons, Pauline Lorillard, Diane Rouxel, Mathilde Warnier, Anaël Snoeck, Sam Louwyck et Elina Löwensohn.
Sur Arte du 15/04/2021 au 13/07/2021
Prix Louis Delluc 2018 du premier film (ex aequo avec Jusqu’à la Garde), Les Garçons Sauvages, librement adapté de l’œuvre de William Burroughs est une expérience hallucinatoire.
Une bande de cinq jeunes garçons, tous interprétés par des jeunes femmes, assassinent leur professeur. Ils sont confiés à un marin qui a pour mission de les “désensauvager”. Après deux mois de traversée, où ils subissent les humiliations du capitaine, qui les nourrit de fruits étranges, ils débarquent sur une île mystérieuse. Peu à peu gavés de sucs de plantes plus extraordinaires les unes que les autres, ils se transforment en femmes.
Bertrand Mandico réalise ici une œuvre pétrie d’une intense fièvre créatrice. Des images gorgées d’un érotisme sauvage qui mélange les couleurs et le noir et blanc extasient nos rétines. Puisant ses sources tant aux origines du cinématographe qu’aux classiques du récit d’aventures ainsi qu’au surréalisme, Les Garçons Sauvages déchaîne un flux cinématographique baroque et fantastique.
Dans la lignée d’un certain cinéma expérimental contemporain qui échappe aux carcans habituels, Bertrand Mandico nous époustoufle de poésie psychédélique.