Art Paris Solo Show : Monique Frydman, Georgina Maxim, Young-Sé Lee, Miguel Chevalier, Patrick Rimaux (Grand Palais éphémère)

Jusqu’au 12 septembre, Art Paris, Champs de Mars. 7, plateau Joffre, 75007 Paris.

En parallèle du Parcours des Mondes (voir les choix de Singulars)Art Paris au Grand Palais éphémère jusqu’au 12 septembre réuni 140 galeries d’art moderne qui proposent leurs meilleurs artistes. Cette 23e édition – située un mois avant la Frieze London et la Fiac les 21-24 Octobre 2021 et quinze jours avant Art Basel 2021 – prouve le regain et l’attractivité des Foires, en faisant la part belle à la scène française. Singulars a retenu cinq Solo Show sur la trentaine proposée dédiés à Monique Frydman, Georgina Maxim, Young-Sé Lee, Miguel Chevalier, Patrick Rimaux, sans oublier Paul Andreu.

Monique Frydman, Violet III, 1992, Gogena Galerie Art Paris 2021 Photo OOlgan

Monique Frydman, Bogena Galerie (777, rote de la Coll Saint Paul de Vence)

« Mes tableaux n’ont rien d’anthropomorphique ni d’organique […]. J’essaie de rendre visible l’origine du visible. » Son désir d’immersion physique dans la couleur rappelle le lyrisme d’une Joan Mitchell ou d’une Judith Riegl l’importance d’un « support en tant que contenu » par ses formats monumentaux. Cette grande figure de l’abstraction contemporaine né 1943 construit une œuvre abstraite exigeante, à la recherche d’une perception toujours plus affinée et puissante de la couleur ouvertement à contre-courant. Son langage résolument abstrait invente un corps encore présent, un langage qui s’imprègne de la nature et de sa biographie sans s’y limiter, une « abstraction excentrique » selon le joili mot d’un critique qui révèle autant une énergie qu’une dynamique de la couleur.

Georgina Maxim, 31 Project (31, rue de Seine, Paris)

Georgina Maxim, 2020, Gumandafa (Never), 31 Project Photo OOlgan

Artiste textile, si on définit son travail par la matière, la Zimbabwizienne Georgina Maxim utilise les techniques de la broderie, de la couture et du tissage pour déstructurer, découper et recomposer des vêtements de seconde main comme un acte de mémoire, une transcription de l’instant, des moments vécus et des histoires qu’évoquent ces textiles usagés.

Comme un journal intime, le relief de ses sculptures textiles porte l’histoire et de la mémoire des corps fantômes qui les ont un jour portés. « Il y a un rapport direct avec la culture funéraire shona : à la suite d’un décès, les habits et objets personnels du mort sont rassemblés à l’extérieur et dispersés auprès des passants, sans que les proches ne puissent dire leur mot », explique Clémence Houdart, codirectrice de la galerie 31 Project. Cet acte, Georgina Maxim le trouve très violent. Pour préserver la mémoire des êtres absents, elle déconstruit et lacère leurs habits, avant de recoudre les bandelettes, patiemment. Comme on suture une plaie.

Fidèle à sa pratique curatoriale, et engagé dans les enjeux sociétaux de son continent, Georgina Maxim a cofondé en 2012 Village Unhu (Zimbabwe), un collectif et un espace artistique à Harare mêlant ateliers, expositions, workshops et programme de résidences.

 

Young-Sé Lee, Vazieux (5bis, rue de Louvre, Paris)

Young-Sé Lee, Rosée-Matinale 1989-1945 Photo Galerie Vazieux

L’histoire et l’œuvre de Young-sé Lee sont un pont fertile entre les deux cultures, coréenne où il est né et française depuis qu’il y vit. Son œuvre plurielle – dialogue avec les matériaux, le papier et les encres naturelles – fait de la nature transcendée sa principale source d’inspiration. Selon une technique d’estampage qu’il a mise au point, l’eau, la roche, la terre ou l’écorce sont révélées par les effets de matière du papier Hanji (papier de mûrier) qu’il colore d’encres végétales et minérales, utilisées dans la peinture coréenne. La combinaison de l’aspect brut de la matière et de la noblesse du papier sur lequel est laissée son empreinte, mêlée à la fluidité de l’encre, confère à ses œuvres une harmonie oscillant entre force et légèreté., tout en se jouant de l’aléatoire du vide et du plein.

Touchant à l’immatériel, elles nous invitent à poser sur elles un regard méditatif. « Ce travail d’imbrications éprouve un espace inachevé sur lequel l’ « apparaître » et le « disparaître » sont l’enjeu de sa vérité. » peut-on lire dans la monographie, parue chez Skira signé de textes de Mael Bellec, Sabine Vazieux, Lydia Harambourg (2021, 160 p.). Ce sont ces peintures qui, venues des profondeurs de l’acquis, résolvent les superpositions d’images ressurgies du passé. L’œuvre traditionnelle plane dans l’ombre, protège sans influencer, à peine perceptible. Ces paysages, ici, sont devenus signes, décomposés, reconstruits autrement. Cela se fait grâce à une technique savante qui, on l’a vu, est, assurément, le seul concept concédé par l’artiste au passé culturel national. […] La superposition des cultures, leur maillage, engendre chez lui une observation accrue, une réflexion plus forte encore, d’où naîtront ces œuvres chatoyants, intenses. »

 

Miguel Chevalier, Galerie lelia Mordoch (59, rue Mazarine, Paris)

Miguel Chevalier Pixels, Galerie lelia Mordoch Art Paris 2021 Photo OOlgan

« Il fallait utiliser ces outils numériques, non pas pour en faire leur apologie, mais pour développer une écriture en soi dans le monde l’art, comme Man Ray l’a fait pour la photo. Comme le disait Baudelaire dans L’art Romantique : « Le public est, relativement au génie, une horloge qui retarde. » Pionnière de l’art numérique en France, l’œuvre pluridisciplinaire de Miguel Chevalier est reconnue pour ses créations virtuelles génératives et immersives tout autant spectaculaires dans l’espace (notamment sur les monuments ou immeubles) qu’expérimentales dans le temps de l’interaction. Elle aborde la question de la virtualité dans l’art, avec la généralité, l’interactivité et la matérialité, interrogeant les liens entre la Nature et Artifice, l’imaginaire de la ville ou encore les flux et les réseaux.

Ses images – fixes ou mouvantes – évolue de façon autonome en perpétuel mouvement procédant d’une lumière, celle des pixels pour produire des effets de matières et des textures visuelles. Le jeu de ses programmations, lui fait créer des œuvres dynamiques, génératives, revendiquées comme des formes de vies artificielles. « Elles se transforment au fur et à mesure avec le temps. Si on n’arrête pas l’ordinateur, les algorithmes vont générer des œuvres à l’infini. La générativité permet de créer des œuvres capables d’évoluer indépendamment de l’artiste. De même, en y introduisant de l’aléatoire, on va engendrer des formes que l’on n’avait pas imaginées. C’est un aspect tout à fait inédit et spécifique de cette création, impossible à réaliser avec les autres mediums artistiques que sont la peinture, la photo et la vidéo. »

Patrick Rimaux, Onde de couleurs, 2018 verre, Film 35 mm Chantons sous la pluie de Stanley Donen, Gene Kelly (1952) Galerie Minsky

Patrick Rimaux, Galerie Minsky (37 Rue Vaneau, 75007 Paris)

Fou de cinéma et de peinture, Patrick Rimaux est autant ingénieur qu’artiste. La spécificité technique de sa démarche artistique déploie une œuvre composite au sens propre du terme, l’obligeant à créer ses propres outils. A partir des pellicules des films que l’intéresse, il construit des tableaux hydrides selon les scènes retenues ; associant outre la pellicule en celluloide de la scène évoquée, par exemple l’arbre de Mon voisin Totoro de Hayao Miyazaki ou L’homme Qui Plantait Des Arbres de Frédéric Back et divers symboles peints, comme le micro comme la révélation finale de Chantons sous la pluie, le tout scellée dans une couche de verre, qui permet par un jeu de lumière d’animer l’œuvre comme une projection de cinéma….
Pour autant de pièces uniques, luminaires intelligents dans le fond comme dans la forme. « incassables » pour leur auteur, inclassables pour l’amateur….

 

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