Culture

Cinema en salles : The Gazer, de Ryan J. Sloan avec Ariella Mastroianni

Publié par Calisto Dobson le 15 mai 2025

 

 

Sélectionné pour la Quinzaine des Cinéastes du Festival de Cannes 2024, puis à Deauville pour le Festival américain,  The Gazer (celle qui regarde au sens contempler et observer) est un thriller ‘scopique’ qui sous l’influence cannibalisée d’un Alfred Hitchcock et d’un David Lynch, prophétise pour  Calisto Dobson l’avènement d’un cinéaste hors des sentiers battus.
Fondu déchaîné de cinéma sous des influx maternels, c’est en autodidacte que Ryan J. Sloan, électricien de métier a réalisé, co-écrit et co-financé avec son actrice principale Ariella Mastroianni, ce premier film offert comme une déclaration d’amour absolu au cinéma de genre. Il sort en salles le 23 avril.

 

Un premier long métrage porté par un désir de cinéma

Véritable tour de force réalisé dans des conditions proches de l’amateurisme, Ryan J. Sloan et Ariella Mastroianni, actrice principale et co-scénariste (avec un tel patronyme comment échapper au cinéma) ont pris à bras le corps ce projet. Sans financement que leurs propres ressources (c’est à souligner, tant le résultat est à la hauteur), les intenses efforts soutenus qu’ils ont dû déployer pour parvenir à leur fin ont été récompensés.

« (…) et à bien des égards, une lettre d’amour aux films qui m’ont inspiré. Un exemple de cinéma local indépendant qui, je l’espère, incitera d’autres cinéastes à défier les voies traditionnelles et à faire les films comme ils le souhaitent, sans attendre d’y être invités. »
Ryan J. Sloan

Féru de références scopiques

Thriller psychologique aux ressorts psychotiques écrit tout autant sous la tutelle d’Alfred Hitchcock que celle de David Lynch, The Gazer  nous entraîne au cœur du labyrinthe psychique de l’héroïne.

Frankie est atteinte de dyschronométrie (trouble de la coordination dans le temps pour faire court), elle est sujette à de longs instants de projection vers un ailleurs qu’elle ne maîtrise pas et dont elle ne se souvient pas.

Suite au suicide de son mari auquel elle aurait assisté sans en avoir aucun souvenir, elle a perdu la garde de sa fille. Sous traitement médical, elle doit réunir une certaine somme d’argent afin de récupérer son enfant. C’est alors qu’une jeune femme lui propose de la payer pour récupérer sa voiture accaparer par son compagnon violent auquel elle veut échapper.

Saisie entre une réalité confisquée par sa pathologie et la volonté lancinante de recouvrer les droits de garde de sa fille, Frankie va nager psychiquement à contre-courant jusqu’à se compromettre. Prise en filature par un réel qui lui échappe, elle devra creuser la teneur de sa propre conscience pour se sortir du guêpier dans lequel elle s’est fourrée. Elle finira par découvrir une vérité qui lui permettra de reprendre sa fille.

The Gazer, de Ryan J. Sloan avec Ariella Mastroianni photo Telstar Films

Entre deux mondes

À l’aide de son actrice habitée d’un charisme étrange et d’une mise en scène utilisant adroitement l’association de la mise en forme de l’image (les placements de la caméra sont mûrement réfléchis alliés à une lumière idoine), et la musique, le réalisateur parvient à intensifier l’attention du spectateur. Il en ressort une atmosphère partagée entre une réalité triviale dans un environnement socio-économique démuni et un onirisme stressé.

The Gazer, de Ryan J. Sloan avec Ariella Mastroianni photo Telstar Films

Une des révélations de l’année

Ce film nourri aux confluents de drames hantés par la psychose des protagonistes, de films noirs dotés de circonvolutions  cérébrales dérangeantes et de thrillers aux imbroglios narratifs trompeurs, figure d’ores et déjà parmi les révélations de l’année.

Ryan J. Sloan cite comme sources d’inspiration, Burning de Lee Chang-dong, Blow Up, Conversation Secrète, Sueurs Froides, Le Troisième Homme ou encore Memento. Ce faisant, l’autodidacte passionné signe un premier film digne de ces exemples.

Auteur de l'article

The Gazer, de Ryan J. Sloan (114 mn)
Avec Ariella Mastroianni, Marcia Debonis, Renee Gagner, Jack Alberts, Tommy Kang

Musique : Steve Matthew Carter
Montage ; Ryan J. Sloan, Jordan Toussaint
Image : Matheus Bastos

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