Hommage à Spielberg

Le monde entier s’apprête à partir du 28 juin à se ruer en masse découvrir la dernière aventure d’Indiana Jones, Le Cadran de la destinée (voir avis). Sa précédente péripétie de 2008 avait laissé pas mal de monde au bord d’une route … qui semblait même mener à une impasse.
Depuis Steven Spielberg a confié le manche du fouet à James Mangold, auréolé d’un Logan d’anthologie et d’une magistrale leçon de course automobile d’endurance, Le Mans 66. Avec son troisième et dernier opus de la Saga, l’héritier de John Ford (cf Fabelmans) n’avait pourtant pas du tout démérité, au contraire. À l’heure du raz de marée annoncé du nouvel opus, il est temps de se poser la question.

Pourquoi Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal a subi tant de quolibets ?

Et si ce quatrième volet de l’homme au Fedora remplit  avec brio toutes les cases pour en faire le grand film d’aventures qu’il est, il n’en reste pas moins une immense incompréhension d’un public qui refuse de voir s’échapper l’image qu’il s’est faite de son héros et du cadre finalement restreint de ses expéditions.

Le public a pourtant répondu présent avec près de 800 millions de dollars de recettes dans le monde, dont 4,2 millions de spectateurs en France. Même à l’époque la critique fût plutôt bonne.

Pourtant si Indy n’a rien à faire dans les années 50, que viendrait-il faire maintenant dans la décennie suivante ? Il est injuste de faire du Royaume du Crâne de Cristal ce ratage tant proclamé.

Dès le début du film Spielberg illustre son propos de façon magistrale

Prenez l’introduction , cette séquence de compétition entre un hot road façon American Graffiti et un véhicule militaire. Ce panoramique magnifique qui rend hommage à John Ford. Et puis cette poursuite entre de jeunes américains ivres de leur insouciance avec des militaires en mission …. qu’ils ne peuvent imaginer être des militaires russes. Malgré les dénégations d’un gradé, le conducteur du véhicule de tête se laisse entraîner dans la course….

La culture américaine, sa liberté et son rock’n’roll, la scène se déroule au son du Hound Dog  d’Elvis Presley, conquièrent le reste du monde.

Plus loin, nous sommes à l’heure atomique et du consumérisme exponentiel. La reconstitution de la petite banlieue américaine factice est à ce titre pénétrante. Arrive l’épisode tant brocardé du réfrigérateur. Bien sûr se calfeutrer au fond d’un frigo pour se protéger d’un essai nucléaire paraît inepte.
Mais vous êtes au cinéma bon sang de bois.

Pour quel réalisme ?

L’Arche et son feu grégeois, le cœur arraché à la main et toujours palpitant, le Graal qui redonne vie, tout ça vous paraît réaliste ?
Toute la suite découle d’une idée simple. Coller à l’époque pendant laquelle se déroule le film et aussi sans doute accompagner le vieillissement d’Harrison Ford et par là même celui du héros.

Comment coller au mieux à l’âge et au temps du héros ?

Il s’agit d’ailleurs encore d’une des questions qui anime Le Cadran de la Destinée. En dehors de l’évidente guerre froide, les Soviétiques ont remplacé les Nazis (rassurez-vous ils reviennent). Au cœur de la culture populaire américaine, dont Indiana Jones est directement issu, à cette période pullulent des périodiques aux noms évocateurs. Tales of the Crypt, les fameux Contes de la Crypte, Vault of Horror  et en particulier Weird Science, ces titres dont Spielberg et son alter ego George Lucas se sont abreuvés jusqu’à la lie.

Et que nous racontent ces comics de gare ?

Des histoires de monstres issus de l’espace, de mutations dûes aux dangers de l’ère atomique, de militaires dépassés face à des adversaires d’un autre monde et surtout des héros détectives, aventuriers ou archéologues qui combattent des menaces   hors normes.

Le culte du Vintage

Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal n’est que la parfaite évocation de toute cette vague culturelle aujourd’hui vénérée par des collectionneurs amateurs de productions populaires d’une époque relativement ancienne. Vintage dirait-on aujourd’hui. Cela sans oublier qu’en sous main ce courant ne fait encore qu’imbiber tout ce qui a trait à la culture pop du jour. Des monstres des Gardiens de la Galaxie?  aux diverses péripéties qui traversent toutes les franchises fantastiques actuelles.

Ne boudons pas notre plaisir de revoir cet épisode si moqué pour de mauvaises raisons. Car à y regarder de plus près, il s’agit d’une aventure réalisée avec autant de maestria et tout aussi palpitante que les autres.

Si Spielberg a remis les clés de la fin des aventures de son héros iconique à James Mangold, faut-il en chercher la raison majeure dans ce désaveu ? Ce n’est pas la version officielle. On ne peut s’empêcher de le penser. Tout en misant toute sa confiance sur le réalisateur de Copland, soyez cependant assurés que l’éternel wonder boy hollywoodien a surveillé comme le lait sur le feu la production du destin final de l’homme dont le patronyme universellement célèbre est celui d’un chien.

#Calisto Dobson

https://youtu.be/GpDoxV0SgR8