Voyages

En Haute Soule au Pays Basque en compagnie des vautours-fauves.

Auteur : Jean de Faultrier
Article publié le 6 juin 2023

(Carnet d’horizons) « Nous avions encore du chemin à faire mais qu’importe, la route, c’est la vie. » (Jack Kerouac) Oui, la vie et la route, encore. Même celle dont l’âpreté apparente recèle quelque chose de fortement tellurique qui incline à la suivre pour se fondre dans la trace. Ce quelque-chose que Jean de Faultrier trouve en Haute Soule dans les montagnes d’Iraty du Pays Basque est à l’abri des routes fréquentées, mais pas de la générosité du ciel, un ciel habité de fauves.

Le Vautour maitre du ciel des montagnes d’Iraty, en Haute Soule, au plus haut en altitude au Pays Basque. Photo Jean de Faultrier

Une sentinelle aérienne et fraternelle.

Des crêtes anguleuses cisaillent l’horizon, le vert et le bleu se disputent un empire qui conserve des pans encore secrets où la nature se fait généreuse, plantureuse même. Le marcheur se sait observé mais il ne connait pas son guetteur. Tout à coup, aimanté par des éclairs fuyant juste au-dessus du temps qui ralentit, son regard surprend un vol de vautours-fauves aux couleurs d’octobre.

Des alizés de plumes survolent ainsi la Haute-Soule, une terre de l’intérieur qui élance avec hardiesse ses pâturages et ses forêts vers un ciel qui souligne l’endroit où le pays s’arrête. La pluie s’invite souvent sur ces reliefs, elle y sculpte des nuances de vert comme nulle part ailleurs. Il n’est de fraîcheur plus réconfortante que celle qui vient nourrir le sol ou désaltérer le corps du passant.

Orage au plus haut en altitude au Pays Basque Photo Jean de Faultrier

Au-dessus des gaves, l’orage redéfinit le ciel.

Quand la pluie a cessé de parler, la forêt reprend la parole et rivalise d’éloquence avec les balcons rocailleux qui la surplombent ou le torrent qui chante à tue-tête dans le tréfond de ses creux violentés. Il n’est de chemin sans surprise, de sentier sans une théâtralité farouche, le vocabulaire incite à piocher dans les mots les plus éloignés comme jungle, canopée, rapides. Des heures entières, l’on se prête à un ailleurs discret et prospère, le regard en éveil devant et au-dessus.

Holçarte Photo Jean de Faultrier

Canyon ou gorge, peu importe, la profondeur est intense.

Le promeneur solitaire devra parfois concéder la priorité aux transhumants, à l’écart de la traverse soudain surpeuplée il laissera passer la farouche détermination des brebis dans un parfum exacerbant la nature à l’œuvre. Jambon, formage, piments égaieront plus tard dans la soirée des saveurs mêlées de bois de hêtre et de cendre tiède.

Chaque année, en mai, juin ont lieu les transhumances des troupeaux pour monter vaches et brebis dans les prairies d’estives Photo Jean de Faultrier

Laine et tatouages sur la route de Barcus.

Si les profondeurs de la nature regorgent de secrets et d’éblouissements à faire surgir, il est permis de s’accorder un moment d’élévation, de vouloir s’approcher au plus près des rapaces qui dessinent des cercles de subsistance sans prédation. Amis des nuées qui s’évaporent au-dessus des vallées, les oiseaux jouent entre des rideaux qui se soulèvent pour déclamer des crêtes insensées et des ailleurs sans lisière.

Le Pic d’Orhy culmine à 2017 m, le premier sommet au dessus des 2000 m des Pyrénées en venant de l’océan. Photo Jean de Faultrier

Sur le sentier des fauves volants.

Un peu plus bas, quand le retour achève d’ancrer dans le souvenir une randonnée téméraire mais heureuse, le regard peut balayer sans compter un panorama si large qu’un récit ne saurait y tenir. Sureau noir, érable, houx, coudrier sont les compagnons plus jeunes des hêtres centenaires, chacun abrite un oiseau dont le chant donne aux heures un sens et une liberté. Au détour des sentiers aux traces giboyeuses, de plantureux promontoires retiennent le promeneur jusqu’à la nuit ombreuse et volubile…

Iraty Photo Jean de Faultrier

360 degrés, plus peut-être.

… ce promeneur qui devrait prendre le temps, quand la lune surgit au-dessus des essences odorantes, de se penser comme un vassal de cette majesté en vie. Dans un dernier froissement, un vautour fauve regagne la corniche qui lui sert de donjon.

La lune regarde la terre qui regarde la lune. Photo Jean de Faultrier

Un passant du ciel.

 

Vautour fauve, gardien des montagnes d’Iraty Photo Jean de Faultrier

#Jean de Faultrier, Haute-Soule, fin août début septembre.

Plus de feuillets du Carnet d’horizons

En savoir plus sur la Haute Soule (montagnes d’Iraty)

Office du Tourisme de Tardets – Pays Basque, Rue Arhanpia, 64470 Tardets

Citation choisie au hasard parmi des dizaines de guide :

(…) l’intérieur des terres regorge également de superbes trésors ! Aujourd’hui, je vous propose un voyage à travers la Haute-Soule pour découvrir 3 villages souletins typiques reliés par une route à couper le souffle. Départ imminent pour Tardets-Sorholus, Licq-Athérey et Sainte-Engrâce (…). (extrait. Guide du Pays Basque)

Pour s’y rendre :

Ces Pyrénées autrefois Basses et désormais Atlantique sont la frontière naturelle qui marque la limite sud de la France. A l’abri de l’océan et de ses adeptes, la Haute-Soule, sœur des deux autres provinces françaises du Pays-basque (le Labourd et la Basse-Navarre), se rejoint par le milieu, comme on dirait par l’entre-deux mers on pourrait dire là par l’entre-deux nationales : ni la 10, ni la 20, l’une trop à l’Ouest et l’autre trop à l’Est.
En ce cœur territorial magnanime, les départementales exultent et donnent à leur catégorie administrativement simple de belles lettres de noblesse.

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