Culture

Hommage de Grégory à son père, Marcel Mouloudji

Auteur :Patricia de Figueiredo
Article publié le 22 septembre 2024

Pour le 30e anniversaire de la mort de Marcel Mouloudji (1922- 1994), Grégory son fils, chanteur également, lui rend hommage à travers ses chansons les plus célèbres, le 4 octobre au PIC Petit Ivry Cabaret à Ivry-sur-Seine : de L’amour, l’amour, l’amour au Déserteur. Un livre écrit par son fils, sa fille Annabelle et Laurent Balandras : Mouloudji, Athée ! Ô grâce à Dieu (éditions Carpentier) et une Anthologie de 70 titres (Universal) permettent de redécouvrir pour Patricia de Figueiredo un artiste populaire singulier; comédien, chanteur, auteur de romans et de pièces de théâtre.

« Les moins de 20 ans » connaissent-ils encore Marcel Mouloudji ?

Avec Charles Aznavour et Jacky Flynt, Marcel Mouloudji fit sa première apparition dans l’adaptation cinématographique de La Guerre des gosses de Jacques Daroy, sortie en 1936. Ma mère, Jacky Flynt, m’évoquait ce souvenir, elle avait également décroché, enfant, son premier rôle – et déjà la gentillesse de Mouloudji rayonnait, ce trait de caractère le caractérisa toute sa vie.

La vie de Mouloudji, de dramatique à lumineuse, est un roman.

Acteur, chanteur, romancier, peintre, il a embrassé toutes – ou presque – les disciplines artistiques.
Né en 1922 dans un Paris populaire, d’un père kabyle analphabète et communiste et d’une mère bretonne bipolaire internée alors que Maurice est encore enfant. C’est grâce à Jacques Prévert qu’il commence à travailler dans le cinéma. Puis il rejoint avec son frère le groupe Octobre. Il écrit un roman Enrico à 22 ans encouragé par Simone de Beauvoir puis se lance dans la peinture.

Le troubadour de Saint-Germain-des-Prés

Ce n’est qu’en 1951 qu’il commence une carrière de chanteur avec La Complainte des Infidèles du film La Maison Bonnadieu.

Dès lors, il enchainera les succès : Comme un p’tit coquelicot, La complainte de la Butte…. Il commence aussi à écrire ses chansons avec Un jour tu verras.

« Sa jeunesse a été extraordinaire, peuplé de gens exceptionnels, de la fine fleur artistique de ce qui a compté au XXe siècle »
Grégory

Lenchanteur compositeur côtoie Vian, Prévert, Dimey, Genet, il chante Ferré, Trenet, CocteauJacques Cannetti le fait signer chez Phillips qui l l’abandonne après la chanson controversé du Déserteur.

Le chanteur fonde alors sa propre maison les disques Mouloudji.

Au fil du temps, il écrit désormais ses propres textes : Faut vivre, Merci la vie, Comme une feuille en automne.
Il disparait en 1994 laissant un patrimoine impressionnant de chansons, de peintures.

En 2017 sa chanson L’amour, l’amour, l’amour, créé en 1963, illustre une campagne publicitaire et une nouvelle génération découvre cette voix extraordinaire.

Entretenir la mémoire

Pour faire vivre ces textes poétiques tantôt romantique, tantôt engagés, son fils reprend le flambeau d’un solide répertoire. Chez Grégory, se retrouve des expressions du visage du père, des éclats de voix et même et surtout ce timbre de voix chantée à nulle autre pareil.

Grégory Mouloudji rend hommage à son père Marcel Photo DR

« Ce n’était pas un père au sens classique de la fonction : il vivait comme l’oiseau sur la branche. Une vie de célibataire, centré sur lui-même. Il était particulier mais très attachant et sympathique. Vers la fin de sa vie, ses problèmes de voix le tourmentaient mais il continuait à prendre des cours de chant.
Chanter c’était toute sa vie. »
Grégory Mouloudji

« J’aurai voulu le faire pour le centenaire de sa naissance en 2022 mais le Covid nous en a empêché » souligne-t-il. On fêtera donc le trentième de sa disparition. Après le succès d’une représentation le 14 juin Grégory rempile le 4 octobre toujours PIC petit Ivry Cabaret d’Ivry-sur-Seine, en attendant, espérons-le une salle à Paris. La voix de Grégory avec à ses côtés Etienne Champollion au piano.
Pour replonger dans l’univers personnel de Marcel.

Patricia de Figueiredo

Le carnet de lecture de Mouloudji

Le livre de l’intranquilité est le vrai faux journal de Bernardo Soares hétéronyme de Fernando Pessoa.

Journal d’un homme à la vie ressemblant assez semble-t-il à celle de Pessoa  lui-même. Une distance mélancolique et pourrait on dire , philosophique nous mène au fil des pages et minutes des pensées de cet homme qui , s’il épousait la fille de sa blanchisseuse, serait peut-être heureux, peut-être…

Passions, d’Isaac Bashevis Singer 

C’est une suite de nouvelles écrites en yiddish, langue mourante que le Prix Nobel de littérature 1978 continua d’utiliser ne serait-ce qu’au cas où , croyant en la résurrection des corps à la suite de la venue du messie, des millions de corps parlant yiddish demanderai  y a-t-il un nouveau livre à lire en yiddish ? ».

« Je mets en scène des personnages uniques, dans des circonstances uniques, des hommes et des femmes qui demeurent aujourd’hui une énigme pour le monde – et souvent pour eux-mêmes – : les Juifs d’Europe Centrale et plus particulièrement les Juifs parlant yiddish qui ont péri en Pologne et ceux qui ont émigré aux Etats-Unis »
Isaac Bashevis? Singer

Il s’agit d’une culture détruite ou presque par les nazis au cours de la seconde guerre mondiale. Les personnages et les situations relèvent d’un monde de fantômes ou bien de gens qui vivent dans la lecture ou encore autour ou par le livre. Ainsi Shabbat au Portugal où une famille de marrannes reçoit Singer dans le cadre d’une conférence sur son œuvre et finissent au cours d’un diner le vendredi soir par lui demander ce que c’est qu’être juif tout en lui avouant qu’ils sont juifs bien qu’ayant perdu la tradition et le rite quand , à la fin du dîner , Singer retrouve en la personne de l’hôtesse sa fiancée d’avant guerre Esther qui a disparu dans la tourmente .

L’autobiographie de mon père, de Pierre Pachet

C’est un homme, modeste dentiste juif, originaire de Bessarabie, nommé Simcha Apatchevsky, ou Opatchevsky, raconté par son fils dans un  émouvant mélange des deux puisque le fils, Pierre Pachet, véritable écrivain  (Nuits étroitement surveillées), écrit à la première personne du singulier et alors ce jeu de miroir vous emmène à travers leur vies lovée l’une dans l’autre sans doute par ce que l’on appelle transmission.

« Mon nom est Simcha, qui veut dire “joie” en hébreu. Je ne puis m’empêcher de le rapprocher de celui d’un de mes illustres contemporains, auquel je pense avoir tant à reprocher, Sigmund Freud (…). Il suffit de voir nos photographies, ou ma figure, pour comprendre que ces noms ne nous ont pas porté chance, à moins de considérer que la joie est restée en nous bien secrète. »
Pierre Pachet

Propos recueillis par Patricia de Figueiredo le 22 septembre 2024

Pour suivre Grégory et Marcel Mouloudji

4 octobre, 20 ans Grégory chante Mouloudji, PIC petit Ivry Cabaret, 11 rue Barbès – Ivry-sur-Seine. Tel. : +33 1 46 72 64 68

A lire : Athée ! Ô grâce à DieuAnnabelle et Grégory Mouloudji, éditions Carpentier. 160p

A écouter et voir :

  • « Mouloudji a 100 ans », coffret 3 CD (75 chansons) plus un DVD de passionnantes archives télévisées de l’INA (2h05 d’émissions), chez Mercury / Universal.
  • « L’Éternelle Romance », un album vinyle de 12 titres, chez Mercury / Universal

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