Sélection Jazz janvier 22 : FloFilz et Alfa Mist, Grégory Privat, Søren Kristiansen et Thomas Fonnesbæk, et Joey Alexander

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Quoi de neuf en jazz en janvier 22 ? Une créativité stimulante en quatre albums aux styles bien différents capable de séduire les réfractaires. FloFilz et Alfa Mist explorent des sonorités plus modernes en lançant des ponts entre les mondes musicaux. Grégory Privat vous emmène dans un territoire intime et propice au retour à soi. A l’hommage de Søren Kristiansen et Thomas Fonnesbæk au maitre Oscar Peterson, Singulars renvoie sur la flamboyance de Joey Alexander.

Uteki, FloFilz & Alfa Mist

En dépit de nos efforts, le jazz souffre (hélas) d’être mal perçu : musique « trop difficile d’accès » pour certains, musique « d’ascenseur » pour d’autres. Bien souvent, l’initiation au jazz ne déclenche pas l’étincelle qu’on pourrait espérer. Elle provoque au contraire une sorte de répulsion assez difficile à briser. En réponse à cela, certains artistes tentent de donner une teinte différente à ce style musical en lui insufflant des sonorités nouvelles. C’est notamment le cas du jeune beatmaker FloFilz qui construit des ponts entre les mondes qui lui tiennent à cœur. Il signe avec Alfa Mist ce titre plein de rythme et de fraicheur qui tourne autour d’un même phrase à partir de laquelle il improvise.
De quoi convaincre les frileux à découvrir l’immense diversité du jazz, à commencer par ce qui suit !

Yonn, Grégory Privat (Buddham Jazz)

Un piano seul expose un joli thème bien accompagné. Pas d’exubérance inutile et mal placée. Le jeu est assez envoûtant pour qu’on ait envie de continuer à l’écouter. La montée en puissance est très progressive. Elle est amplifiée par l’arrivée d’une voix qui vient soutenir le piano. Bien souvent, le contraire se produit. La démarche artistique est donc bien intéressante. Cette voix apporte une touche nouvelle, plus humaine. Grégory Privat (1984) revient ainsi sur le devant de la scène en signant ce sixième album (en leader) plus intimiste que les précédents.
Pour la première fois, il se retrouve seul à seul avec son piano, armé de ses doigts et de sa voix. C’est ce format nouveau qui lui permet de créer une musique plus introspective.
Prochains concerts : 30/03 : Le Bal Blomet, Paris – 21/05 : Cité de la Musique, Marseille

The Touch, Søren Kristiansen & Thomas Fonnesbæk (Storyville)

Figure emblématique et incontournable, le pianiste Oscar Peterson (1925-2007) s’est toujours distingué par son jeu plein de vitalité techniquement absolument irréprochable. C’est ainsi qu’il a marqué au fer rouge des générations entières de jeunes pianistes qui se sont mis, humblement, à marcher dans ses pas. Søren Kristiansen (1962) en fait partie. Son dernier album, The Touch, qu’il co-signe avec le contrebassiste Thomas Fonnesbæk (1977) reprend quelques interprétations du maître des touches blanches et noires.
Tout l’enjeu est là : rester dans l’esprit d’Oscar Peterson tout en parvenant à apposer son sceau. Ce dernier point est, selon moi, la faille de l’album. J’estime que ce pianiste danois n’arrive pas à imposer un style assez personnel et unique. La reprise du thème Soft Winds n’a pas grand-chose d’original et l’improvisation reprend des phrases de Peterson avec moins d’intensité. Peu de surprises donc.

Pour comparer, voici une version d’Oscar Peterson. Vous verrez par vous-même que les différences ne sont pas flagrantes.

Pour aller un peu plus loin, je vous propose un contre-exemple. En 2017, le jeune virtuose Joey Alexander (2003) présente au public l’album Joey.Monk.Live! dans lequel il reprend, de la même façon, les grands thèmes de Thelonious Monk (1917-1982).
La différence est flagrante. Qu’on aime ou qu’on n’aime pas, ce qui compte, à mes yeux, est le fait que deux mondes distincts (J. Alexander & T. Monk) s’élèvent l’un à côté de l’autre, qu’ils s’enrichissent l’un l’autre.

#EzechielLeGuay