Crécelle, de Françoise Taillandier – Mozart mon amour, de Christophe Barbier

Tout oppose Fleur Taillefer, personnage inspiré de la véritable Florence Foster Jenkins et Mozart. Pourtant, la pièce de Françoise Taillandier, ‘Crécelle’ (Le Guichet Montparnasse jusqu’au 25 février 24) comme celle de ‘Mozart, mon amour’ de Christophe Barbier (le lundi au Théâtre de Poche Montparnasse) se rejoignent parce qu’elles interrogent subtilement ce qui détermine le talent et sa postérité. Formidablement brossés et campés – les auteurs sont aussi sur scène – ces deux spectacles musicaux se savourent pour Olivier Olgan tant par l’émotion libérée que pour leur bienveillante intelligence.

Crécelle, de et avec Françoise Taillandier et Pascal Nicolleau
(Les jeudis – 20h45, Les dimanche – 18h
Le Guichet Montparnasse)

Françoise Taillandier,
avec Pascal Nicolleau, son accompagnateur dans Crécelle, Le Guichet Montparnasse Photo DR

Après Xavier Giannoli (Marguerite, 2015) et Stephen Frears (Florence Foster Jenkins, 2016), Françoise Taillandier auteure et comédienne se saisit avec une verve réjouissante de la figure – inspirée de l’histoire vraie de Florence Foster Jenkins (1868 – 1944), de cette riche américaine des années 40, tellement portée sur le chant, et ayant les moyens de se produire sur scène en public, que personne ose lui avouer qu’elle chante faux.

Après avoir écrit et campé une Suzanne Valalon, solide et sincère à la fois, dotée elle, de vrais talents artistiques qui su non sans mal s’imposer dans un monde d’homme, Françoise Taillandier brosse une figure féminine pratiquement à l’opposée sut tous les plans, mais tout aussi investi dans son art et touchante. Fleur Taillefer est une chanteuse passionnée qui ne se rend pas compte des limites de sa voix, malgré les avertissements très précautionneux de son pianiste accompagnateur, incarné par Pascal Nicolleau. A la fois magnifique de bienveillance et consterné par les audaces de sa patronne. Pour se réaliser, l’argent ouvre les portes, le public est au rendez-vous même si ce n’est pas forcement pour les bonnes raisons…. Face à tant de convictions, le ridicule s’efface !

Crécelle de et avec François Taillandier, Le Guichet Montparnasse Photo DR

Avec ce talent de concision dans les dialogues comme dans les situations dramatiques, le classique duo chanteuse/accompagnateur prend entre complicité et abattement une dimension explosive et irrésistible, que la moindre inflexion fait basculer dans le rire ou le pathétique. Le plus touchant dans cette femme sincère un rien manipulatrice, c’est qu’elle fait fi des objections, convaincue de son étoile et des ailes du désir pour réaliser son rêve. Malgré les obstacles qu’elle vit comme une nécessité pour se réaliser.

La mise en scène de Guillaume Tarbouriech réussit à recréer l’époque extravagante des années 20, avec ses costumes à paillettes, et ses boas colorés. La sensation que toutes les folies sont possibles avec des moyens financiers semblent même réalistes. Finalement pas si éloigné de ces « célébrités » qui percent par le seul nombre de leur followers. Cette ambivalence de la réussite artistique – qui finalement détermine un talent – fait la force et l’actualité de la pièce, et  de ce portrait de femme au désir aussi déterminée qu’aveugle sur la réalité de talent. Cette fragilité reste longtemps dans la mémoire et ne cesse de fasciner.

Pour s’en convaincre, l’ enregistrement de Florence Foster Jenkins dans l’air de la nuit de Mozart  montre que tout est possible à ceux qui croient en eux !

Mozart mon amour, de et avec Christophe Barbier, Pauline Courtin, Vadim Sher.

Mozart, mon amour (Poche Montparnasse)

Le lundi à 21h, Théâtre de Poche Montparnasse

Avec une gourmandise communicative, Christophe Barbier plaide dans son ‘Mozart, mon amour’ pour la postérité de Wolfgang Amadeus d’hier, elle ne fut pas évidente sans l’engagement de sa veuve, mais aussi d’aujourd’hui. Si « Mozart fait partie de nous, Mozart est notre intime » comme le rappelle l’auteur et comédien, il est toujours important qu’il soit joué, la soprano Pauline Courtin et le pianiste Vadim Sher sur scène participent à la réussite de ce spectacle stimulant, véritable invitation toujours mieux approfondir Mozart. 

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Olivier Olgan