Culture
Le carnet de lecture de Patricia de Figueiredo : Marion Fayolle, Éric Emieraux, Laurent Wirth
Auteur : Patricia de Figueiredo
Article publié le 26 juillet 2024
Le choix éclectique de Patricia de Figueiredo appelle à sortir des sentiers battus: Du même bois, de Marion Fayolle (Gallimard) obtient le Prix Marcel Pagnol 2024. Créée par Floryse Grimault, décerné au Fouquet’s, il récompense depuis sa création, un livre sur le thème des souvenirs d’enfance. Ici une ambiance dans une ferme familiale où l’histoire se reproduit par génération. Autre ambiance avec Quand l’abîme te regarde, d’Éric Emeriaux (Récamier Noir) décrit une plongée dans la guerre de Bosnie-Herzégovine et ses ramifications pour le chef de l’OCLGH, un triller passionnant. Enfin, pour une réflexion profonde et pourtant limpide, l’essai de l’agrégé et docteur en histoire Laurent Wirth, La possibilité du pire, (édition L’Harmattan) sur la naissance des guerres de 14-18, 39-45 et 2022… ?
Du même bois, de Marion Fayolle (Gallimard)
Pour son premier roman, Marion Fayolle, dessinatrice de presse et autrice de romans graphiques frappe fort. Elle nous entraine dans une ferme avec l’élevage des vaches, la naissance des veaux, le caprice des saisons. Les grands-parents, les parents, les enfants reproduisent peu ou prou les mêmes gestes, se laissant enfermer dans un cercle de travail entre amour de leurs bêtes et résignation. Le style se plie à l’ambiance, ça sent le travail, le labeur, l’odeur du foin. Mais il y a la dernière, cette cette gamine qui se révolte pour un rien.
« La mère de la gamine mange en face de la mémé. Un tête-à-tête avec ses propres défauts, avec tout ce qu’elle refuse de devenir. Je te dis que ça ne te regarde pas, tu te mêles toujours de tout. La fille aussi lui dit ça. La mère s’énerve contre la mémé, lui en veut d’être pareille, d’être comme elle n’aimerait pas.»
Marion Fayolle est lauréate du Prix Pagnol, ce prix créé par Floryse Grimaud dans les contreforts de la Provence à Aubagne, présidé cette année par Grégoire Delacourt, avec comme critères, une attention particulière accordée à la qualité du style et à l’excellence de la langue française.
Une belle distinction pour un roman qui le mérite.
Quand l’abîme te regarde, d’Éric Emieraux (Récamier Noir)
Le pavé de l’été qui va vous tenir en haleine. Michel Rinocci, dit ‘Rhino » est colonel et chef de l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité, les génocides et les crimes de guerre (OCLCH). Un braquage dans un hôtel particulier à Paris le remet sur la piste d’un passé qu’il aurait voulu oublier. En effet, durant la guerre de Bosnie-Herzégovine, il a été avec son groupe de chasseur alpin, témoin d’un génocide. Les responsables qu’il avait cru disparus, se révèlent bien vivants. Une chasse aux criminels s’organise. Pendant ce temps, son fils se rend en Serbie pour un festival. Avec l’ide d’une amie il va remonter la piste de son père et soulever d’autres secrets.
Un double regard sur les tragiques événements et les crimes de guerre. Un roman qu’on ne lâche pas. Il faut dire que l’auteur sait de quoi il parle. Il est en effet l’ancien chef de ce fameux OCLCH.
La possibilité du pire, de Laurent Wirth (L’Harmattan)
Comment naissent les conflits mondiaux ? Quels sont les déclencheurs ultimes qui au milieu de tensions entre états finissent par dégénérer au niveau mondial ?
Pour Laurent Warth, la question revêt une double dimension :
- Celle du processus qui a conduit à la guerre de 1914, en 1939 et en 2022 : était-elle l’aboutissement d’une fatalité inéluctable, d’une irrésistible course à l’abîme ?
- Celle du ressenti des Européens qui ont vécu ces surgissements successifs de la guerre : s’attendaient-ils au pire ou furent-ils frappés de sidération face à son irruption soudaine ?
- L’éclatement des guerres européennes est souvent considéré, avec le recul, comme le résultat prévisible d’un enchaînement causal avec des responsabilités identifiées.
Après une mise en perspective des conflits des premières et deuxièmes guerres mondiales,
Laurent Warth pose alors la question de la guerre entre la Russie et l’Ukraine et l’attaque du 24 février 2022. Il interroge sur les signes précurseurs de cette attaque et sur une possible extension mondiale du conflit.
Un essai passionnant, qui éclaire de façon limpide notre histoire. S’il ne rassure pas, il nous alerte.
Pour suivre Patricia de Figueiredo
Lire tous ses articles en tant que contributrice de Singular’s : Curieuse en bonne verseau de ce qu’elle ne connaît pas encore, convaincue comme Jean d’Ormesson que « Tout le bonheur du monde est dans l’inattendu ». Cette autrice de plusieurs romans aime rencontrer des chefs, des vignerons, revenir à ses premières amours du théâtre et bien sûr faire partager ses découvertes littéraires. Dans une autre vie, Patricia fut également rédactrice en chef du magazine Culture Papier et rédactrice pour Le Journal du Parlement.
sur son roman Vous n’aurez pas mes cendres ! (Safran)
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