Culture

Le carnet de lecture de Romain Puyuelo, comédien, Rimbaud, Cavalcades !

Auteur : Olivier Olgan
Article publié le 9 juin 2024

S’il s’est spécialisé un peu par hasard dans les spectacles familiaux (Le Petit poilu illustré, le Petit résistant illustré), Romain Puyuelo a trouvé avec Arthur Rimbaud, un aiguillon à la hauteur de son ambition : montrer que la poésie n’est pas un « truc d’intello ». Le succès de son « Rimbaud Cavalcades ! » repris à 19h au Théâtre de l’Essaion jusqu’au 25 juin, puis au Théâtre de la Tâche d’encre d’Avignon (17h, 3 au 21 juillet) prouve que le comédien a trouvé son public. Il récidive avec « L’esprit critique illustré, le spectacle dont le cerveau est le héros » avec sa forme de « poésie scientifique » qu’il sait faire vivre. Le comédien a confié à Olivier Olgan sa conviction que le théâtre peut tout transmettre mine de rien, en faisant confiance à l’intelligence du public.

Pourquoi vous êtes lancé à bride abattue dans Rimbaud Cavalcades !, dont le succès se prolonge à Paris puis au Festival d’Avignon ?

J’avais envie de m’adresser aux plus grands, par nécessairement aux adultes, pour élargir le public familial habitué à nos spectacles : Le bal des Abeilles, Le Petit poilu illustré, Le Petit résistance illustré.

 Je voulais m’adresser aussi directement aux lycéens. Pour Rimbaud, Cavalcade!, ils ont l’âge du rôle, j’avais envie de les amener à aimer la poésie, mais de façon différente qu’avec une lecture de textes.

Sortir du stéréotype que la poésie est une truc d’intello.

En lisant de nombreuses biographies sur Rimbaud, il fallait continuer à les inciter pour qu’à la fin, ils aient envie d’écrire ou de lire de la poésie. Cela m’a intéressé de trouver la ligne juste. Je me suis entouré de Nicolas Vallée, qui a une grande expérience des seuls-en-scène, qui est professeur de scénario à l’Ecole de cinéma 3IS et qui est un immense connaisseur de la chanson française. Il a bien voulu s’immerger avec moi dans l’aventure.  Je cherchais un coach pour l’écriture, l’improvisation , et la mise en scène en me laissant écrire ce que je recherchais. Il savait dire quand l’idée  fonctionnait ou pas.

 Comment s’est construit le récit de Rimbaud Cavalcades ! ?

Ce fut un gros boulot de choix dans les œuvres et dans les anecdotes biographiques. J’ai découvert petit à petit les écrits d’ Ernest Delahaye, Georges Izambart, Mathilde Mauté de Fleurville alias Mme Verlaine, ouvrages seulement disponibles dans les sous-sols de la BNF… Là j’ai trouvé de quoi faire parler les personnages qui entouraient ou ayant croisés Rimbaud de son vivant, ou vivant encore aujourd’hui, comme le responsable du cimetière de Charleville, qui relève le courrier de la boite aux lettres de Rimbaud.

Au fur et à mesure des représentations depuis deux ans, le spectacle a-t-il évolué ?

Le texte a peu évolué, au fil des représentations, on peut dire que mon jeu s’est assoupli. Le seul en scène est surtout une question de confiance en soi. Le public fait bouger les lignes et suivant leurs réactions, le spectacle évolue. Les lycéens sont sans filtres, leurs réactions sont parfois très surprenantes.
Et de nouveaux projets depuis, comme la création de « L’esprit critique illustré » y ont contribués! La commande du Parc aux Etoiles (Triel-sur-Seine dans les Yvelines), créée en avril dernier est ambitieuse : différencier les faits des opinions et des croyances. Pas facile hein ?

Quels ont été les choix pour la création de L’esprit critique illustré ?

Nous avons choisi d’élargir la réflexion scientifique à l’esprit critique, mais traitée de façon décalée, en duo comique dans une ambiance cabaret avec mon complice Alexandre Letondeur (magie, chants, duo de clown, sketches…), pour faire prendre conscience de l’impact de la science, comme par exemple un tour de magie pour faire comprendre ce que sont les algorithmes ! Nous tenons là un outil d’éveil efficace à l’attention des grands collégiens.

 

Le théâtre, selon vous, ne doit pas se contenter de divertir, puisque vous n’hésitez pas à « garantir un spectacle pour devenir intelligent en une heure sans rien faire » ?

J’ai eu envie de faire découvrir le théâtre aux jeunes de façon rafraichissante ; pour que ce soit toujours un bonheur d’être au spectacle et d’apprendre des choses sans en avoir l’air. Tout le contraire de l’école, forcément didactique.

C’est ainsi que la science nous a rattrapé pour nous inviter dans ses institutions comme avec  « Le Bal des Abeilles » que nous avons développé pour La Cité de la Science…

Traiter le savoir de façon marrante et véridique pour transmettre aux plus jeunes sur des sujets graves. Nous avons trouvé notre place. 

Être capable de jouer d’intriguer un public qui n’est jamais allé au théâtre en leur racontant une histoire, c’est qui m’intéresse et c’est pour cela que j’ai commencé et continue le théâtre. La force du théâtre et des acteurs investis sur scène est de nous faire croire à leur personnage. Et tout est possible et c’est d’une force infinie.

Ce qui est difficile dans notre métier c’est de décrire ou un projet avant qu’il n’existe. Ce qui a fait partie du parcours du Rimbaud, réussir à convaincre des producteurs de vous faire confiance sur un projet, comme ce fut le cas du Festival des 400 coups !

Heureusement, certains sont sensibles à l’ambition !

Propos recueillis par Olivier Olgan

Le carnet de lecture de Romain Puyuelo

En plus de tout ce qu’on peut ressentir, on apprend toujours quelque chose au théâtre.

Parfois on en ressort transformé, c’est magique ! J’ai beaucoup appris sur les liens familiaux, la religion, et la folie des hommes grâce à Tchekhov, Molière, ou Shakespeare, sur les rapports amoureux avec Musset et Marivaux.

Je garde en mémoire un rôle que j’ai eu dans La Ménagerie de verre, de Tennessee William car pendant les répétitions j’avais découvert le film Un tramway nommé désir, d’Elia Kazan avec Marlon Brando. Je trouvais le personnage de Stanley assez ressemblant au personnage de Tom que je devais interprété. J’étais très jeune et tout en m’inspirant Brando m’avait terrorisé !

Ils m’inspirent toujours : Sean Penn, Tom Hanks, Christoph Waltz, Buster Keaton, Mastroianni, Gene Hackman

Et les actrices Meryl Streep, Naomie Watts et Camille Cottin

Au cinéma, j’aime les acteurs, on vit dans leurs yeux.
Au théâtre, je préfère la troupe !

La folie, la surenchère, la démesure, j’aime les métaphores, les images colorées, les ombres et les lumières, la représentation de la violence avec les moyens artisanaux. J’aime aussi tous ces spectacles qui revisitent des grands auteurs sans toutefois les respecter à la ligne.
Parfois c’est très raté, mais c’est comme si le travail d’écriture suivait une lignée… depuis les grands mythes.
Les grands auteurs de théâtre se sont également inspirés d’autres grands auteurs… 

Pour une île déserte

Mis à part les œuvres complètes de Rimbaud ?

Quelques Bashung,

Jimmy Hendrix

et l’intégrale de Bach

Le baron perché, d’Italo Calvino – Trad. nouvelle traduction de l’italien par Martin RueffGallimard 2018

Le baron perché, d’ Italo Calvino
Une serviette et une planche ! Le surf comme « Côme » du « Baron perché » c’est de la glisse, du plein air, de la liberté à l’éclat brut.

Pour suivre Romain Puyuelo

Le site de Cie dhang-dhang, Maison des Associations, 44, rue des créneaux, 78510 Triel sur Seine – dhangdhang@gmail.com

Rimbaud, Cavalcades !

Le Petit résistant illustré

  • 11 octobre, Pujaut (30)
  • Du 21 au 22 novembre, Saint Genix sur Guiers (73)

Le Petit Poilu illustré

  • 8 octobre, Espace Maurice Béjart, Verneuil sur seine (78)

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