Mécaniques

L’histoire de la flûte traversière française, selon Guy-Claude Luypaerts

Auteur : Pierre d’Ornano
Article publié le 6 décembre 2018 à 13 h 05 min – Mis à jour le 23 décembre 2018 à 19 h 40 min

Guy-Claude Luypaerts, flûtiste, compositeur, chef d’orchestre, mais également pianiste, livre à Singular’s l’histoire de l’école de la flûte traversière française. Une spécificité dans le monde musical au croisement des XIXe et XXe siècles, qui perdure…

Mais revenons à la « préhistoire » de cet instrument, de la famille des bois (son matériau d’origine), qui, sans l’ingéniosité des facteurs, le génie des compositeurs et le talent des interprètes, se réduirait à un tuyau percé, à embout biseauté.

Première apparition en Asie

Les traces des premiers spécimens instrumentaux, dont descendent la flûte à bec et la flûte traversière européenne, et dont la facture assure une maîtrise qui permet de les ranger parmi les instruments capables d’émettre des sons musicaux, remontent au paléolithique. Selon le livre de Robert Hériché « A propos de la flûte… [Gérard Billaudot -Editeur 1985] : « la flûte traversière est apparue en Chine , ou tout au moins en Extrême-Orient, et il semble qu’elle ait connu une longue éclipse pendant l’Antiquité, et qu’elle ait été introduite dans le monde musical de l’Occident par le canal de la civilisation byzantine, en fréquents rapports avec l’Orient. »

Carmen-Entracte (G. Fauret), Marcel Moyse Flûte

Trois instruments de la famille des flûtes traversières : Le piccolo, la flûte en ut ou grande flûte et la flûte en sol.

Trois instruments de la famille des flûtes traversières : Le piccolo, la flûte en ut ou grande flûte et la flûte en sol. Photo © Guy-Claude Luypaerts

La flûte Böhm

Après (à partir du 18e siècle) quelques évolutions techniques, il faut attendre le 19e siècle et Theobald Böhm (1837) pour que la grande flûte traversière moderne apparaisse. Le flûte Böhm, qui insère la perce cylindrique, laisse à la seule tête une perce conique et dote l’instrument d’un système mécanique avec ouverture et fermeture de plusieurs trous à l’aide d’un seul doigt, va s’imposer (comme le métal qui peu à peu remplace le bois). La flûte Böhm séduira, en 1837, l’Académie des Sciences et fera son entrée au Conservatoire de Paris en 1838, introduite par le professeur J.-B. Coche. Denis Buffet-Auger (1840) l’améliorera encore, puis Louis Lot.

Paul Taffanel- Andante pastoral et Scherzettino :

« Avec ses capacités techniques nouvelles, la flûte traditionnelle contemporaine va être portée par des instrumentistes solistes, compositeurs, chefs d’orchestres, comme Claude Paul Taffanel (septembre 1844 – novembre 1908) et Philippe Gaubert (juillet 1879 – juillet 1941) qui se sont appropriés l’instrument », précise Guy-Claude Luypaerts. Ils domineront la discipline instrumentale, en composition et en interprétation, en favoriseront l’expansion à tel point que l’on parlera d’une école de la flûte traditionnelle française. Le mouvement s’est perpétué jusqu’aux années 1940. Et d’ajouter : La particularité de ces flûtistes, qui est rare, est qu’ils étaient également compositeurs. Ils ont ainsi œuvré à la production notamment de pièces pour flûtes solo pour ensemble instrumentaux, essentiellement en musique de chambre. Ces fondateurs ont donné par la suite naissance à de grands solistes comme Roger Bourdin et Jean-Pierre Rampal (janvier 1922 – mai 2000), élèves de Joseph Rampal, père de Jean-Pierre, comme le furent Alain Marion (décembre 1938 – août 1998) et notre contemporain Maxence Larrieu. »

J. S. Bach – Trio Sonata G m BWV 1029 – Vivace, Adagio, Allegro
Maxence Larrieu, Giuseppe Nova, Luís Meireles Júlio Dias 14.09.2016, Igreja de S. Francisco – Guimarães Gravação : Aflaup Associação de Flautistas de Portugal

Un instrument soliste à part entière

« Les compositions vont surtout être jouées en musique de chambre, ce qui est très français, poursuit Guy-Claude Luypaerts. L’instrument convient merveilleusement aux lieds, aux œuvres de Gabriel Fauret, d’Henri Duparc (janvier 1848 – février 1913), Gaubert, Claude Debussy (août 1862 – mars 1918), Maurice Ravel (mars 1875 – décembre 1937)…  C’est l’époque des gammes pentatoniques (par tons de 5 notes), des quartes augmentées, on aime les sonorités hispaniques et japonaises. » L’instrument est moderne à l’image de Claude Debussy, à cheval entre le XIXe et le XXe siècle, qui va renouveler le langage musical de son temps et porter attention à la couleur et aux timbres instrumentaux, en les valorisant. Il collera au courant impressionniste qui va s’imposer de 1890 à 1920 et se développer essentiellement en France, initié dans la musique par le Prélude à l’après-midi d’un faune (1894) de Claude Debussy, qui jouera de symbolisme en idéalisant l’univers.
En outre, « entre 1880 et 1920, cette période verra se croiser, sur 40 ans, de César Franck (décembre 1822 – novembre 1890) à Igor Stravinsky (juin 1882 – avril 1971) un nombre incroyable de musiciens compositeurs de talent.

Flûte alto, en argent et en or du facteur japonais Miyazawa.

Flûte alto, en argent et en or du facteur japonais Miyazawa. Photo © Guy-Claude Luypaerts

A l’heure actuelle, selon Guy-Claude Luypaerts, « la flûte est devenue, de par la texture qu’on en tire, un instrument soliste à part entière ». Faite aujourd’hui de différents matériaux, dont le cuivre, l’argent et l’or, la flûte traversière Böhm accompagne les musiciens et la musique depuis plus de 180 ans et a épousé toutes les formes musicales.

Jean Pierre Rampal, Syrinx de Claude Debussy’s, pour flûte seule. Cette courte pièce illustre la dernière mélodie que joue le dieu Pan avant de décéder dans le pièce Psyché de Gabriel Mourey (septembre 1865 – février 1943).

Le parcours musical et les oeuvres d’un musicien Montmartrois…

Guy-Claude Luypaerts est le fils du musicien Guy Luypaerts, chef d’orchestre et compositeur,
ami de musiciens aussi divers que Charles Trenet (mai 1913 – février 2001) ou Henri Dutilleux (janvier 1916 – mai 2013).

Ses publications :
-De…

Guy-Claude Luypaerts est le fils du musicien Guy Luypaerts, chef d’orchestre et compositeur,
ami de musiciens aussi divers que Charles Trenet (mai 1913 – février 2001) ou Henri Dutilleux (janvier 1916 – mai 2013).

Ses publications :
-De la flûte (5 volumes), éditions Leduc,
-Méthode pour flûte, éditions GCL,
-Partition pour flûte et piano (version saxophone et piano) de Physalie aux, éditions Leduc.

Distinctions :
-Prix Stéphane Chapelier-Clerghe-Gabriel Marie décerné en 1981 par la SACEM,
-Nommé en 1989 « Sociétaire définitif honoris causa » de la SACEM.

Guy-Claude Luypaerts dans son appartement Montmartrois. Compositeur pour flûte solo mais aussi orchestre, il perpétue l’esprit de l’école de la flûte traversière française.

Guy-Claude Luypaerts dans son appartement Montmartrois. Compositeur pour flûte solo mais aussi orchestre, il perpétue l’esprit de l’école de la flûte traversière française. Photo © Pierre d’Ornano

Ses compositions –> Editions Luypaerts

Parcours d’un enfant musicien de Montmartre…

« A 7 ans et demi, lorsque je suis entré dans cette profession de musicien [G-C Luypaerts est alors scolarisé à l’école de la rue du Mont Cenis, à Montmartre Paris 18e], je ne pensais pas que je deviendrai plus tard compositeur, chef d’orchestre et surtout soliste à la flûte » déclare encore étonné Guy-Claude Luypaerts.
Ses professeurs : d’abord élève au cours de la pianiste et claveciniste Françoise Petit (1925-2015). Cette dernière le dirige vers la pianiste Charlotte Samaran, petite fille de Paul Tafanel (1844-1908) prix de Rome et fondateur de l’école française de flûte traversière. « Chose curieuse, déclare Guy-Claude Luypaerts, quand on sortait de son cours on aimait le solfège ». Il la suivra au Conservatoire de Paris dans sa classe de formation musicale, où il obtint le 1er prix. Parmi les médaillés se trouvait notamment le futur compositeur Olivier Greif, décédé en 2000. A 13 ans, « grâce » à Charlotte Samaran, Guy-Claude Luypaerts qui s’ennuie un peu au piano où il n’acquiert pas la virtuosité de certains de ses autres camarades et prenant conscience qu’il ne pourrait pas faire une carrière de soliste, se met à la flûte traversière.

Avec Robert Hériché (1906-1991), en 3 ans de pratique il est prêt techniquement pour le CNSMP (Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris). Gaston Crunel le présente au concours d’entrée de sa classe. A 14 ans, déjà inscrit en classe préparatoire d’harmonie, il obtient une première médaille d’harmonie chez Roger Boutry (grand prix de Rome) puis un premier prix de flûte, à l’unanimité, chez Roger Bourdin.

Nous sommes en 1968, année de troubles, et de rencontre pour Guy Luypaerts avec Jean-Pierre Rampal qui devient cette année-là un de ses trois (seulement) élèves, en cumulant les classes de contrepoint chez Alain Weber et de fugue chez Yvonne Desportes. Il obtiendra en 1968 et 1969 le 1er prix de flûte conservatoire de Paris avec Jean-Pierre Rampal.
Il fait ensuite la connaissance du grand soliste (sans doute l’égal de Rampal) Maxence Larrieu, et perfectionnera encore, à son contact, sa technique. Maxence Larrieu interprétera, en 1ère audition, le second concerto pour flûte & orchestre à Cimiez de Guy-Claude Luypaerts. Il interprétera également ses premières œuvres concertantes, gravées sur microsillon, et une partita qu’il imposera, en 2015, au concours international Maxence Larrieu.

Autres rencontres dans son parcours : Robert Blot et Richard Blareau, tous deux chefs à l’Opéra de Paris, avec qui il travaillera la direction d’orchestre.
Par la suite, et après de nombreux prix remportés, Guy-Claude Luypaerts sera, pendant 6 ans, flûtiste à Radio France et donnera des cours dans certains conservatoires municipaux, dont le conservatoire Camille Saint-Saëns du 8e arrondissement, en tant que professeur hors classe de la ville de Paris. Il anime une master class avec récital filmé au conservatoire de Zemun, localité Serbe située sur le territoire de Belgrade.

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