Vins & spirits
Le prix des primeurs bordeaux en chute libre
Auteur : Mohamed Najim
Article publié le 19 juin 2024
[Les pépites de la révolution viticole] Avec une baisse des prix du Bordelais à 17,5 % selon la Maison de négoce Dubecq, la campagne de primeurs du printemps 2024 offre une belle occasion pour les amateur de bordeaux de constituer une belle cave, s’ils sont bien conseillés, à un meilleur rapport qualité prix, loin des excès du millésime 2022. Mohamed Najim, coauteur de Quand le vin fait sa révolution (Ed. du Cerf, 2021) a sélectionné une dizaine de crus de domaines où les bouteilles se négocient entre 10 et 25 euros. Il ne faut pas bouder son plaisir et tordre le coup à cette mauvaise rumeur que les primeurs seraient « finis », peut être pour les vignerons, pas pour les amateurs bien éclairés.
Une passe difficile pour les primeurs 2024
La traditionnelle campagne de primeurs, au printemps 2024, se passe mal pour les grands châteaux du Bordelais. Cos d’Estournel, à Saint-Estèphe, accuse un recul de 39 % par rapport à 2023, Mouton-Rothschild et Lafitte-Rothschild, tous les deux à Pauillac, dégringolent respectivement de 37 et 32 %.
En revanche, les châteaux plus modestes résistent mieux : Haut-Marbuzet, en Haut-Médoc, ne baisse que de 12 %, tandis que Baron de Brane, en Margaux, ou encore Pape Clément, en Pessac-Léognan, chutent de 7 %.
En moyenne, la baisse des prix du Bordelais se chiffre à 17,5 % selon les calculs de la Maison Dubecq, fameux négociant local.
Un rééquilibrage salutaire après l’ « année du Siècle »
Alors bien sûr, les primeurs de l’année dernière, qui vendaient par anticipation la vendange de 2022 avaient beaucoup grimpé, la qualité de ce millésime s’annonçant comme une « année du Siècle », à l’instar de 1982. Une retombée des prix était donc presque inévitable. Les producteurs, en revanche, sont d’humeur plutôt maussade et, parmi eux, surtout les crus classés.
Mais ne boudons pas notre plaisir : les amateurs de Bordeaux vont pouvoir se régaler sans trop vider leur portefeuille.
Les raisons de cette déprime sont bien connues.
D’abord une conjoncture internationale alarmiste, en Ukraine comme au Moyen-Orient. Le marché chinois qui s’est fortement rétracté avec la crise du Covid et le changement de ligne politique de Pékin. La baisse de la consommation de vin, surtout rouge, dans les pays traditionnellement consommateur joue également un grand rôle. Les producteurs qui avaient beaucoup planté en anticipant une hausse continue de la demande sont pris à contrepied. La Gironde, dont la surface en vignes approchait les 118 000 hectares en 2020, soit cinq fois la Bourgogne, a commencé à arracher. Les grands crus, ceux du classement de 1855, qui avaient beaucoup augmenté leurs superficies depuis la Libération sont également en surproduction.
La leçon du printemps bordelais est claire : « les primeurs, c’est mort«
Les consommateurs n’achètent plus en primeurs. Une grande professionnelle est même allée jusqu’à nous confier : « Les primeurs, c’est mort ».
A l’origine, dans les années 80, c’était un moyen, pour les consommateurs, d’acheter moins cher des vins qui arriveraient sur le marché deux années plus tard. En contrepartie, ils faisaient la trésorerie des domaines. Année après année, cet avantage, consenti par les châteaux, s’est amenuisé. Au point qu’à partir de 2006, la différence est devenue négative pour les consommateurs.
Seule exception : les primeurs 2020 ont de nouveau été une bonne affaire pour les acheteurs, le Covid poussant les vignerons a beaucoup baisser les prix du millésime 2019. Mais l’éclaircie n’a duré qu’une année.
Nous allons vous conseiller de véritables pépites.
Avec un peu de flair, il est quand même possible de faire quelques bons achats.
Il faut privilégier quelques domaines parmi les plus modestes, dont les bouteilles se négocient entre 10 et 25 euros.
Or ceux-là, bien sûr, sont capables de vous proposer de véritables pépites.
Voici 11 vins de Bordeaux que l’on peut acheter en primeur 2023 (prix TTC)
- Château Haut-Bages Libéral, de Claire Villars – c’est mon coup de cœur – cinquième grand cru classé de Pauillac. 210 € les 6 bouteilles.
- Clos Floridène, de Florence et Denis Dubourdieu
- Graves blanc, 100€ les 6 bouteilles.
- Graves rouge, 100€ la caisse de 6 bouteilles.
- Alcée, Côte de Castillon de Nicolas Thienpont, 102€ la caisse de 6 bouteilles.
- Château du Retout, Cru Bourgeois supérieur, Médoc. 65€ la caisse de 6 bouteilles.
- Château La Gurgue, Margaux, de Claire Villars Lurton (Vigneronne de l’année 2023). 126 € la caisse de 6 bouteilles.
- Sarget, deuxième vin de Gruaud Larose, Saint Julien. 160 € les 6 bouteilles.
- Lacoste Borie, deuxième vin de Grand-Puy-Lacoste, cinquième grand cru classé de Pauillac. 152 € les 6 bouteilles.
- Château Ormes de Pez, Saint-Estèphe, de la famille de feu Jean-Michel Cazes. 138 € les 6 bouteilles.
- Côte de Baleau, grand cru classé de Saint-Emilion. 110 € les 6 bouteilles.
- Chateau La Fugue de Nénin, Pomerol, 165 € les 6 bouteilles.
En savoir plus sur la révolution viticole
Lire : Quand le vin fait sa révolution, Etienne Gingembre et Mohamed Najim, Ed. du Cerf, 2021, 288 p., 20€, et sa « constellation de vins d’exception, de vins de gourmandise, de vins de saveurs, de vins d’émotion »
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