Culture

Le Carnet de Lecture d'Emmanuel Pélaprat, claveriste, harmoniumiste, ClassiCahors

Auteur : Olivier Olgan
Article publié le 19 juillet 2023

Quel que soit le clavier, Emmanuel Pélaprat a un besoin viscéral de découvertes et accorde sa dynamique de musicien au diapason :  l’interprète maîtrise tous les claviers – de clavecin ancien et moderne à l’orgue, en passant par le piano et l’harmonium d’art, convaincu que chaque partition sonne mieux sur son clavier de création. De ses recherches l’historien ouvre un large champ de répertoires méconnus. Enfin, cette soif de partage de nouveautés dans leur jus, le fondateur et directeur artistique du Festival de ClassiCahors la partage du 21 juillet au 7 aout. Avec une promesse tenue stimulante de « musique pour tous, accessible à tous ».

Un désir d’aventure chevillé aux claviers

Passionné de claviers, sous toutes leurs formes, Emmanuel Pélaprat se réjouit que « les musiciens soient tournés sur plusieurs instruments sans à avoir à se spécialiser comme autre fois ». Cette diversité respectée et reconnue l’encourage dans son projet exigeant et – o combien stimulant – de rapprocher chaque partition de son clavier de création. Ambition qui jette une nouvelle lumière sur l’un de ses instruments de prédilection, l’harmonium d’art dont la mauvaise image – nourrie d’ignorance sur ses possibilités harmoniques – ne le rebute pas. Au contraire. Un public à conquérir a toujours été un aiguillon pour notre trépidant gascon.

Changer le regard porté sur l’harmonium d’art

L’instrument a été inventé pour ses capacités expressives pour les Salons privés d’amateurs. S’il a été très vite récupéré par l’Eglise, son répertoire disponible est très important que ce soit en France, ou en Allemagne : de nombreux compositeurs de Berlioz à Liszt ont écrit pour lui : toute sa vie Saint-Saëns y revient. La vogue était telle – plus de 10 000 instruments produits par an que de nombreuses œuvres ont aussi été transcrites. Son déclin est venu d’une certaine difficulté à le maitriser (des mains et des pieds) et à l’entretenir, l’électrification à favoriser d’autres instruments, sans oublier la séparation de l’Eglise de l’Etat, qui a l’a enfermé dans le chœur.

L’alliance du patrimoine et d’un répertoire de qualité

Sa soif de découvertes à pousser le pianiste à s’intéresser à cet instrument délaissé, mais aux partitions intéressantes. D’autant qu’il peut s’appuyer sur ses complices de l’ensemble Double Expression ou le pianiste Jérôme Granjon pour sortir des chemins battus et de redécouvrir et mettre en valeur de la musique française.

Cette démarche ouvre le potentiel de vastes défrichements. Plusieurs disques témoignent de la qualité des révélations : Chant de guerre (Les musiciens et la Grande Guerre, Vol. 11) et Fantaisies du Second Empire, duos harmonium et piano (Edition Hortus). Pas moins de 6 projets sont en cours comme l’intégrale de la musique pour Harmonium de Saint-Saëns (3 cd), des pièces voix et clavier de Cesare Galeotti (1872-1929) (3 cd)….

En parallèle de l’harmonium d art, notre claviériste vise à réhabiliter le clavecin moderne avec pédales, trop rapidement réduit au ‘bastringue’ de Landowska.

Le son est magnifique grâce à des instruments très élaborés signés en autres de Pleyel qui n’a rien à voir avec le mouvement baroque ! D’ailleurs il ne convient pas à Bach.  Son répertoire de De Falla à Poulenc jusqu’à Ohana et Ligeti – est complétement inconnu. Je serais vraiment malheureux de ne pas m’y consacrer, me limitant à ne jouer qu’un seul clavier. Les pianistes ont un tel répertoire qu’ils peuvent se contenter de rester dans leurs sillons. Les autres sont condamnés à la découverte.

« Découverte, Diversité, Ouverture »

Le Festival de ClassiCahors que notre explorateur de saveurs musicales a fondé en 2016 sert à la fois de laboratoire et d’ateliers collectifs pour valider ses intuitions et ses convictions qui se résument en quelques mots : « découverte, diversité, ouverture ». «  11 concerts sous le signe des cordes, multiples et variées. Les frottées du violoncelle d’Ophélie Gaillard, du violon de Théotime Langlois de Swarte, des pincées de la harpe de Sandrine Chatron, du théorbe de Gabriel Rignol ou celles vocales de la soprano Marie-Laure Garnier. Des rencontres et des échanges avec les artistes, des après concerts avec produits du terroir à déguster en toute convivialité, des nouveaux lieux à découvrir, des rencontres « jeunes talents », des partages avec le public, une Académie Chœur du festival avec des stagiaires venus de toute la France dirigé par Michel Piquemal et l’Orchestre du Festival sous la direction de Guillaume Chilemme avec une nouvelle génération de musiciens. »

Nous parions sur l’émulation de rapprochements intergénérationnels pour partager la transmission de la musique en alliant apprentissage par l’expérience et épanouissement artistique.

La musique pour tous, accessible à tous

Le Festival ClassiCahors vise tous les publics et toutes les musiques Photo DR (1)

Ne lui parlez ni de désaffection du public, ni que « tout a déjà été tenté« , le directeur artistique habitué à partager sa curiosité balaye toutes les objections, tant il est confiant autant sur l’ouverture de son public que sur le soutien de ses partenaires locaux.

Ce qui est passionnant dans cette période d’émulation, alors que l’on ne cesse de parler de disparition, il n’ y a jamais eu autant de labels, autant de créations de musique jamais enregistrées, il n’y a jamais autant de festivals. Dans un contexte difficile économiquement, il y a une floraison de démarches artistiques passionnantes qu’il n’y avait pas à 20 ans. C’est enthousiasmant, cela donne foi en l’avenir.
Le classique a de l’avenir. A nous de le prouver.

Vous comprenez pourquoi ce musicien rayonnant et attachant revendique tranquillement de construire le festival du Futur. Suivons Emmanuel Pélaprat et ses complices dans leurs terres de curiosité, vous découvrirez du nouveau. Pour le plus grand bien de vos oreilles.

Olivier Olgan

Le Carnet de lecture d’Emmanuel Pélaprat

D’Anglebert, œuvre pour clavecin, Scott Ross (Erato, 1990)

Découverte du clavecin adolescent et de la musique française du XVIIe s.

 Symphonic Acclamations & Gregorian Paraphrases, Matthieu de Migel, orgue Priory, 2020

Bach à Leipzig : L’Apogée d’une pensée créatrice, Stéphane Bois, orgue, Hortus, 2023

Un disque d’orgue pour illustrer mon activité d’organiste. Bach au-dessus de tout ou musique symphonique début XXe s, mon répertoire de prédilection.

Fantaisies du Second Empire, Jérôme Granjon, piano ; Emmanuel Pélaprat, harmonium Hortus, 2017

 

Illustration de mes recherches et activité d’harmoniumiste.

Deux sommets de la musique romantique vocale.

Gustav Mahler, Symphonie n°8 (1906/07), Frankfurt Radio Symphony Orchestra ; Eliahu Inbal

 

Gabriel Fauré, Requiem (version 1893), La Chapelle royale, Philippe Herreweghe, Harmonia mundi, 1988.

 

Francis Poulenc, Concert champêtre (1928), Robert Veyron-Lacroix, Orchestre National de l’ORTF, Jean Martinon, Erato, 1971.

Mes nouvelles recherches, le « clavecin moderne »

https://youtu.be/vaSZz_Debfk

Trois livres

  • François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe
  • René Barjavel, La Nuit des temps (1968)
  • Albert Samain, œuvre poétique

Pour suivre Emmanuelle Pélaprat

La chaine youtube d’ Emmanuel Pelaprat

Un des sites du Festival ClassiCahors Photo DR

ClassiCahors du 20 juillet au 7 aout 2023 : En huit ans d’existence, le festival se renouvelle chaque année avec un programme toujours plus ambitieux et toujours plus prestigieux placée sous le signe des Cordes, multiples et variées quelles soient frottées, pincées, frappées ou simplement vocales ! Avec une même promesse : faire découvrir la musique classique en toute simplicité et à des tarifs abordables.

 

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