Culture
L’Amour c’est surcoté, de Mourad Winter
En adaptant lui même sur grand écran son roman à succès « L’amour c’est surcoté » (Robert Laffont 2021 – Pocket 2025), Mourad Winter, l’humoriste romancier désormais réalisateur signe une comédie sentimentale moderne, drôle et sensible.
Cette chronique d’une masculinité fragile et désorientée constitue pour Calisto Dobson, un véritable bain de jouvence. Au travers d’un humour de fanfaron s’affiche une foi en l’humanité qui, il faut le dire, fait du bien. Elle bouscule les préjugés trop rapidement jetés sur la comédie ‘à la française’ dont une nouvelle génération d’humoristes contribue à renouveler la diversité.
La comédie à la française reprend du souffle
Même si le genre dit de comédie à la française traîne derrière lui une fâcheuse réputation, en triant le bon grain de l’ivraie certains succès tels que ceux d’ Un Petit truc en plus, Un Ours dans le Jura ou encore En Fanfare, À Bicyclette, pour ne citer que les plus récents chroniqués par Singular’s, prouvent que le niveau peut se relever.
De plus, depuis quelques années et disons-le tout net, depuis l’avènement d’un Jamel Debbouze et autres Éric et Ramzy, nous assistons à l’émergence d’une génération issue de ce qui est politiquement correctement nommée ‘la diversité’ venant du monde humoriste. Celle-ci face à l’arbre Debbouze qui cache la forêt, débarque avec bonheur pour certains sur nos écrans. Que ce soit Omar Sy, Fabrice Éboué, Thomas Ngijol, Jean-Claude Zadi, Ahmed Sylla ou encore Malik Bentalha, j’en passe et pour ce qui nous concerne aujourd’hui Mourad Winter et Hakim Jemili, tous ont en commun des origines sociales marquées par leur ascendance.
Il serait présomptueux de prétendre qu’il s’agit là d’un mouvement quelconque affilié à une tendance. Mais bien de l’éclosion d’une France diversifiée enfin reconnue comme telle.

L’Amour c’est surcoté, de Mourad Winter avec Hakim Jemili photo Iconoclast
Oser la question de la masculinité
Il fallait certainement un peu de courage pour s’attaquer sous la forme d’une comédie populaire (dramatique ou pas), à la question de la masculinité et ses rapports avec la gente féminine au sein d’un environnement social à priori adepte d’une domination sans faille de l’homme sur la femme.
Le succés de son roman L’amour c’est surcoté a permis d’établir qu’il était temps de s’extirper de clichés certes encore bien réels et cependant éculés. La bataille rangée pour l’acquisition de ses droits d’adaptation n’en a que facilité une transcription ambitieuse sur grand écran.
De la singularité musulmane à l’universalité sentimentale
Même sans avoir lu le roman, cette comédie sentimentale est une réussite.
Drôle, tantôt graveleuse, tantôt provocante, mais sensible, elle aborde avec justesse les difficultés que peut ressentir un homme d’origine musulmane à s’épanouir au sein d’une relation amoureuse. S’il s’agit certainement en partie d’un vécu, la réussite du film réside aussi dans sa capacité à justement faire oublier les origines sociales du protagoniste et incidemment démontrer la généralité du propos.
La question du positionnement de sa masculinité et de son rapport aux femmes au sein d’une relation sentimentale concerne tous les hommes.
Un finesse politique accomplie
La façon dont est également abordée à la hussarde l’antagonisme musulman juif fait preuve d’un sens politique avéré.
Au travers d’un humour de fanfaron s’affiche une foi en l’humanité qui, il faut le dire, fait du bien. Bourré de saillies et de réparties vachardes, les dialogues qui fusent nous rappellent les origines d’humoriste de l’auteur.

L’Amour c’est surcoté, de Mourad Winter avec Hakim Jemili et Laura Felpin photo Iconoclast
Un rôle féminin bien croqué et bien incarné
Il nous faut également souligner la qualité du fil narratif et l’intelligence affective placée dans le personnage féminin, doté du charme piquant de la talentueuse Laura Felpin. Celle-ci trouve ici un rôle qui devrait pouvoir lui en offrir bien d’autres. Sa prestation après celle remarquée dans la saison 1 de Bref.2 (disponible sur Disney +), est d’une grande justesse.
Un clown blanc, plus qu’un simple passeur de vannes.
Quant à Hakim Jemili, prêt à toutes les fuites en avant afin d’éviter de se confronter au réel, pris entre le clown blanc et l’Auguste, il prouve à l’instar de son rôle dans Mercato, de Tristan Séguéla avec Jamel Debbouze, malgré le flop du film, qu’il peut être autre chose qu’un simple passeur de vannes.
Sous couvert d’une comédie “communautaire”, qui, nous l’espérons trouvera son large public, L’Amour c’est surcoté parvient à toucher le cœur de tous les hommes à la psycho affectivité chamboulée.
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le compte instagram de Mourad Winter
avec Hakim Jemili, Laura Felpin, Benjamin Tranié, Abdulah Sissoko, François Damiens, Abbes Zahmani, Clotilde Courau (98 mn)
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